Nations Unies

Conseil de sécurité

S/2001/398

Distr. générale

24 avril 2001

Français

Original: anglais

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Rapport du Secrétaire général sur la situation concernant le Sahara occidental

 

I. Introduction :

1. Le présent rapport est soumis en application de la résolution 1342 (2001) du Conseil de sécurité, en date du 27 février 2001, par laquelle le Conseil a prorogé le mandat de la Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) jusqu'au 30 avril 2001 et m'a prié de faire le point de la situation avant l'expiration de ce mandat. Le Conseil escomptait que, sous les auspices de mon Envoyé personnel, James A. Baker III, les parties -le Royaume du Maroc et le Front populaire pour la libération de la Saguia El-Hamra et du Rio de Oro (Front POLISARIO) - continueraient de tenter de résoudre les multiples problèmes auxquels se heurte l'application du Plan de règlement et d'essayer de se mettre d'accord sur un règlement politique mutuellement acceptable de leur différend au sujet du Sahara occidental. Le présent rapport décrit les faits nouveaux intervenus depuis mon précèdent rapport au Conseil, daté du 20 février 2001 (S/2001/148).

II. Faits nouveaux intervenus pendant la période à l'examen

A. Activités de l'Envoyé personnel du secrétaire général

2. Au cours de la période considérée, mon envoyé personnel a pu recommencer à déployer des efforts résolus en vue d'aider les parties à se mettre d'accord sur un règlement prompt, durable et mutuellement acceptable de leur différend au sujet du Sahara occidental. Dans ce contexte, il s'est entretenu séparément avec des représentants des deux parties, avec certains membres du Conseil de sécurité et avec des représentants de la MINURSO et du secrétariat de l'Organisation des Nations Unies.

B. Cessez-le-feu et autres questions

3. Dans le dernier rapport que j'ai présenté au Conseil de sécurité (S/2001/148), je décrivais les dangers que le rallye Paris-Dakar - qui avait traversé le territoire et pénétré en Mauritanie les 7 et 8 janvier 2001 avait fait courir à la paix dans la région. Le Front POLISARIO est, en fin de compte, revenu sur sa décision de reprendre les opérations militaires à ce moment-là, mais les tensions sont restées élevées et l'intégrité du cessez-le-feu a été compromise par le fait que le Front POLISARIO a déployé des forces sans notification préalable et a imposé des restrictions à la liberté de circulation des observateurs militaires de la MINURSO. Il y a eu depuis lors des progrès encourageants vers le rétablissement du statu quo ante, encore que certaines restrictions à la liberté de circulation de la Mission soient toujours en vigueur, comme indiqué à la section E ci-après. J'espère que le Front POLISARIO prendra d'autres mesures en vue de recommencer à respecter scrupuleusement l'accord de cessez-le-feu.

4. C'est dans cette atmosphère que, le 15 mars 2001, les autorités militaires marocaines ont fait savoir à la MINURSO qu'il était envisagé de commencer à construire dans le coin sud-ouest du Sahara occidental une route asphaltée qui traverserait la zone tampon de 5 kilomètres et pénétrerait en Mauritanie près de Nouadhibou. Le même jour, une compagnie d'infanterie de l'armée royale marocaine s'est déployée près de Guerguerat, à un kilomètre environ au nord d'un poste de contrôle de l'armée, à l'endroit où la route côtière traverse le mur de sable. Cette compagnie devait assurer la sécurité des entrepreneurs qui travailleraient à la construction de la route en direction du sud entre le poste de contrôle et la route Nouadhibou-Nouakchott-Dakar.

5. Mon Représentant spécial, M. William Eagleton, et le commandant de la Force ont appelé l'attention de leurs contacts civils et militaires marocains sur le fait que la construction envisagée posait des problèmes délicats et que certaines des activités entreprises pourraient contrevenir à l'accord de cessez-le-feu. Le 17 mars, le commandant de la zone militaire sud de l'Armée marocaine a donné par écrit à la MINURSO l'assurance que la compagnie d'infanterie marocaine n'irait pas au sud du mur de sable dans la zone tampon de 5 kilomètres. Le jour fixé pour le début des travaux, le 25 mars, est maintenant passé et il n'y a aucun signe de construction de route dans la région. Je note cette retenue avec satisfaction et j'espère que la question pourra être réglée de façon satisfaisante par les parties concernées, le Maroc, la Mauritanie et le Front POLISARIO.

6. Pendant la période considérée, mon Représentant spécial a tenu des consultations avec le Gouvernement marocain et le Front POLISARIO au sujet de l'évolution de la situation au Sahara occidental. Le 27 février 2001, il s'est entretenu à Rabat avec le Secrétaire d'Etat marocain aux affaires étrangères, Taïeb Fassi Fihri. Le 14 mars, accompagné du Président de la Commission d'identification, Eduardo Vetere, il a rencontré dans la région de Tindouf le coordonnateur du Front POLISARIO auprès de la MINURSO, Emhamed Khaddad. Le 28 mars, mon Représentant spécial s'est entretenu à Genève avec le Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés, Ruud Lubbers, et avec le Vice-Président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR), Jacques Forster.

C. Procédure de recours

7. Pendant la période considérée, la Commission d'identification a terminé la tâche d'harmonisation et de contrôle de la qualité des données recueillies pendant la deuxième série de recours et a corrigé certaines erreurs mineures dans la liste provisoire des personnes admises à voter. Le premier jet d'un manuel relatif à la tenue des audiences sur le fond a été produit il a été examiné par la Commission et son utilité pratique a été mise à l'essai dans le cadre d'audiences simulées portant sur de vrais dossiers de recours. Des préparatifs ont été entrepris en vue de permettre à la Commission, le cas échéant, de commencer à examiner les recours en instance dans le cadre d'une procédure accélérée.

8. Le Président de la Commission d'identification a poursuivi ses consultations avec les coordonnateurs du Gouvernement marocain et du Front POLISARIO au sujet du programme de travail de la Commission, portant une attention particulière aux corrections apportées à la liste provisoire des personnes admises à voter du fait du processus d'harmonisation des dossiers.

D. Prisonniers de guerre

9. Au cours des deux derniers mois, aucun progrès n'a malheureusement été fait en ce qui concerne le rapatriement des 1 481 prisonniers de guerre marocains encore détenus dans des camps dans la région de Tindouf en Algérie. La plupart d'entre eux sont détenus depuis plus de 20 ans et c'est là une question humanitaire et une question de droits de l'Hhomme qu'il convient de régler d'urgence. Je lance une fois encore un appel aux parties pour leur demander d'organiser sans tarder le rapatriement de tous les prisonniers sous les auspices du CICR.

E. Aspects militaires

10. Au 20 avril 2001, les effectifs de la composante militaire de la MINURSO étaient de 230 militaires, soit l'effectif autorisé (voir annexe). Sous le commandement du général Claude Buze (Belgique), la composante militaire a continué de surveiller le cessez-le-feu entre l'armée royale marocaine et les forces militaires du Front POLISARIO qui était entré en vigueur le 6 septembre 1991.

11. Les restrictions que les commandants de la région militaire du Front POLISARIO ont imposées à la liberté de circulation des observateurs militaires des Nations Unies (S/2001/148, par. 15 et 16), depuis que le rallye Paris-Dakar a traversé le territoire les 7 et 8 janvier 2001, ont considérablement réduit la faculté de la MINURSO de surveiller la situation militaire et le statut du cessez-le-feu dans la zone située à l'est du mur de défense. Pendant la période considérée, le commandant de la force et les observateurs militaires des Nations Unies se sont entretenus avec les commandants de région du Front POLISARIO pour réduire ces restrictions. Actuellement, les patrouilles au sol de la MINURSO ne peuvent toujours pas s'approcher à moins de 800 mètres des unités de combat et des postes d'observation du Front POLISARIO. D'importants secteurs au sud et à l'est de l'antenne d'Agwanit leur sont également interdits. Quant aux opérations de reconnaissance aériennes de la MINURSO, elles sont limitées à la zone réglementée de 30 kilomètres située immédiatement à l'est du mur de sable.

12. A l'ouest du mur de sable, les patrouilles d'observateurs militaires de la MINURSO ont continué d'inspecter les unités de l'armée de terre marocaine de dimensions supérieures à celles d'une compagnie, conformément aux arrangements de cessez-le-feu conclus entre l'Armée marocaine et la MINURSO. Le 5 mars 2001, une patrouille de la MINURSO a identifié deux avions de chasse de l'armée royale marocaine survolant la zone réglementée le long du mur de sable. Après une enquête officielle menée par la MINURSO, l'armée royale marocaine a expliqué dans une lettre qu'il s'agissait de vols d'entraînement et que les pilotes avaient pénétré par erreur dans la zone.

F. Police civile

13. Au 20 avril 2001, la composante police civile de la MINURSO comptait 34 membres placés sous le commandement de l'inspecteur général OM Prakash Rathor (Inde). La police civile continue de protéger les dossiers et documents confidentiels aux centres de la Commission d'identification à Laayoune et à Tindouf et d'entreprendre des activités de formation et de planification en prévision d'activités futures éventuelles. A cet égard, les membres de la police civile de la MINURSO ont continué d'assister à des réunions d'information organisées par le Bureau de liaison du Haut Commissariat pour les réfugiés à Laayoune au sujet de l'aspect protection du rapatriement librement consenti et des instruments internationaux relatifs aux réfugiés.

G. Préparatifs en vue du rapatriement des réfugiés sahraouis

14. Pendant la période considérée, le HCR a continué d'assumer les responsabilités qui lui avaient été confiées à l'égard des réfugiés sahraouis dans les camps de Tindouf, en Algérie. Dans le cadre de son programme multisectoriel de soins, entretien et protection à l'intention des réfugiés sahraouis, il a vérifié les conditions de vie des réfugiés dans les quatre camps de Tindouf et il a coordonné ses activités avec le gouvernement hôte, ses partenaires d'exécution ainsi qu'avec les représentants des réfugiés et les dirigeants du Front POLISARIO. Il a aussi continué de collaborer avec mon Représentant spécial et les composantes de la MINURSO concernant le rôle qu'il devra jouer à l'avenir conformément au Plan de règlement des Nations Unies.

15. Les contraintes financières subies par le HCR ont obligé celui-ci à réduire son assistance de base, ce qui a eu des conséquences préjudiciables pour les bénéficiaires, en particulier les réfugiés vulnérables. Le HCR suit de près la situation dans son ensemble et, en collaboration avec ses partenaires, il classe ses opérations selon un ordre de priorité de façon à privilégier les activités "de survie", en mettant l'accent sur les réfugiés vulnérables.

16. Le 22 février 2001, le HCR a organisé une réunion tripartite avec le Programme alimentaire mondial (PAM) et l'Office humanitaire de la communauté européenne (ECHO) à Genève, destinée essentiellement à améliorer la situation alimentaire dans les camps. Entre autres conclusions majeures de la réunion, ECHO a décidé, à titre de mesure d'urgence, de créer un stock régulateur de trois mois et le PAM a réaffirmé qu'il était prêt à acheminer par la suite des aliments de base. Le HCR a organisé à Alger du 1er au 4 avril 2001 une réunion consacrée à l'examen de son plan d'exécution et d'opération pour 2001 et 2002, à laquelle ont participé le gouvernement hôte, les organisations non-gouvernementales avec lesquelles il travaille, et les représentants des pays donateurs, des organismes des Nations Unies et des réfugiés. Les participants ont recommandé la constitution d'un groupe humanitaire officieux qui échangerait des informations et examinerait les questions intéressant les réfugiés sahraouis dans les camps de Tindouf.

H. Organisation de l'unité africaine

17. Dès le départ, l'Organisation des Nations Unies a collaboré avec l'Organisation de l'unité africaine (OUA) à la recherche d'un règlement du problème du Sahara occidental. Je tiens à remercier à nouveau de son appui et de son concours la délégation observateur de l'OUA auprès de la MINURSO, dirigée par le représentant principal de l'OUA, l'ambassadeur Yilma Tadesse (Ethiopie).

III. Aspects financiers

18. Comme je l'ai indiqué dans mon rapport précédent (S/2001/148, par. 20), l'Assemblée générale, par sa résolution 54/268 du 15 juin 2000, a ouvert un crédit d'un montant de 49,3 millions de dollars, soit environ 4,1 millions de dollars par mois, aux fins du fonctionnement de la MINURSO pour la période allant du 1er juillet 2000 au 30 juin 2001. Ce crédit est suffisant pour financer les activités de la Mission jusqu'à la fin de l'exercice financier en cours. En ce qui concerne l'exercice 2001-2002 commençant le 1er juillet 2001, le projet de budget que je propose pour la Mission est de 48,8 millions de dollars et il a déjà été examiné par le Comité consultatif pour les questions administratives et budgétaires. Je pense que l'Assemblée générale examinera le projet de budget en mai 2001 pendant la deuxième partie de la reprise de sa cinquante-cinquième session. Au 31 mars 2001, le montant des contributions non acquittées au compte spécial de la MINURSO s'élevait à 90,7 millions de dollars. La même date, le montant total des contributions non acquittées au titre de l'ensemble des opérations de maintien de la paix s'établissait à 2 371 400.000 dollars.

IV. Observations et recommandations

19. Malheureusement, je ne suis pas en mesure de dire que les efforts entrepris pour surmonter les obstacles à l'application du plan de règlement ont enregistré des progrès. Toutefois, je suis convaincu que l'on est maintenant mieux à même de déterminer si le Gouvernement marocain, en tant que puissance administrative au Sahara occidental, est disposé à offrir à tous les habitants et anciens habitants du territoire ou à appuyer un transfert de responsabilité dans certains domaines, qui soit authentique, important et conforme aux normes internationales.

20. Compte tenu de cette avancée, mon Envoyé spécial a recommandé que le mandat de la MINURSO soit prorogé de deux mois, jusqu'au 30 juin 2001, pour lui laisser le temps de s'entretenir à nouveau avec les parties, soit séparément, soit dans le cadre d'une réunion commune, soit les deux, en vue d'envisager un transfert de responsabilité tel qu'il est indiqué ci-dessus, et d'examiner d'éventuelles solutions aux problèmes relatifs à l'application du plan de règlement. Je partage les vues de mon Envoyé personnel à cet égard et engage le Conseil à proroger le mandat de la MINURSO de deux mois, jusqu'au 30 juin 2001.


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