OPINION
 

Arrêtons l’hémorragie !!

Baba Sayed


Depuis 1988, le F. Polisario subit une sorte d’hémorragie ininterrompue qui lui fait perdre régulièrement beaucoup de ses meilleurs cadres et militants. Face à l’ampleur et à la gravité du phénomène, les dirigeants du Polisario ont décidé d’adopter une politique de l’Autruche qui peut s’avérer, à court et à moyen terme, lourde de conséquences.

Au cours des quinze dernières années seulement, le tiers de la direction du F. Polisario a rejoint le Royaume du Maroc : le ministre des Affaires étrangères, le ministre de la justice, le chef des services de renseignement, le chef de l’une des régions militaires, la plus importante, l’ancien responsable des unités de la défense anti-aérienne (DCA), la secrétaire générale de l’Union des femmes et la responsable des relations extérieures de cette même union, le wali d’Aousserd, le responsable des communautés sahraouies en Espagne, les représentants en Italie, et en Syrie… et j’en passe.
Tous ces cadres, pour la plupart compétents et expérimentés, n’ont pas, du moins pour une majorité écrasante d’entre eux, rejoint le Maroc, nous pouvons en témoigner,  par conviction, par amour ou parce que, et après les très longues années passées à la Ahmada, ils se sont, dans « un sursaut de nationalisme » rendus compte, comme l’affirment, à tort, l’Agence Marocaine de Presse (MAP) et d’autres médias makhzéniens de service, qu’ils avaient tort de consacrer tant d’années de leur jeunesse à la lutte pour l’indépendance du Sahara Occidental.

Tous ces cadres sahraouis, et bien d’autres centaines d’anonymes et des sans grades, ont rejoint le Maroc parce qu’ils ne pouvaient plus supporter une situation de pourrissement, de blocage, d’injustice, de statu quo et de laisser aller entretenue, semble-t-il, à dessein par une direction du F. Polisario qui a atteint, depuis longtemps, les limites de l’incompétence !!

Et depuis que ses cadres ont fait acte d’allégeance au Royaume et à son roi, dans les conditions particulièrement douloureuses et humiliantes que l’on connaît, la direction du F. Polisario n’a pas bronché. Par une sorte de bravade indécente, elle fait comme si le phénomène n’existe pas, n’a jamais existé. Elle donne, en tout cas, l’impression de ne vouloir y accorder aucune importance ni en mesurer les graves et incalculables conséquences et répercussions sur l’avenir de la cause sahraouie.

Les mauvaises langues disent même que cette hémorragie non seulement vers le Maroc mais aussi vers d’autres destinations, arrange les dirigeants du Polisario et que, d’une certaine façon, ces derniers l’encouragent. Car du moment où la direction du F. Polisario ne tient pas à remettre en cause ses pratiques, à revoir ses orientations et ses politiques, et à satisfaire toutes (ou une grande partie) des revendications de réforme émises par des contestataires, il est vrai, de plus en plus nombreux et exigeants, elle a définitivement opté pour la politique du pire. Au lieu de laisser ces dissidents dans les rangs de l’organisation et de courir ainsi le risque d’être, constamment, exposée à leurs critiques et leurs remontrances, la direction du F. Polisario a décidé de s’en débarrasser, une fois pour toutes, en leur faisant subir des brimades, des humiliations et des vexations qu’ils ne peuvent pas supporter.

Cette politique est, osons les termes, irresponsable et criminelle. C’est une politique, faut-il y insister, de courte vue, suicidaire, et éminemment dangereuse. Elle aura, si elle n’est pas revue et corrigée rapidement à travers l’élaboration et la mise en œuvre d’un programme de réforme ambitieux et conséquent des structures et institutions du F. Polisario, un effet boomerang fatal sur la cause sahraouie et son évolution dans les mois, voire les années à venir.

31.10.06


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