Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2002/467

Distr. générale

19 avril 2002
Français
Original: anglais

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Rapport du Secrétaire général sur la situation concernant le Sahara occidental

 

I. Introduction

1. Le présent rapport est soumis en application de la résolution 1394 (2002) du Conseil de sécurité, en date du 27 février 2002, par laquelle le Conseil a prorogé le mandat de la Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) jusqu'au 30 avril 2002 et m'a prié de lui faire rapport sur la situation avant la venue à terme du mandat en cours. Réaffirmant ses résolutions antérieures sur la question du Sahara occidental et l'engagement qu'il a pris d'aider les parties à parvenir à une solution juste, durable et mutuellement acceptable, le Conseil a décidé d'examiner activement les options présentées dans mon rapport du 19 février 2002 (S/2002/178). Le présent rapport décrit les faits survenus depuis cette date.

II. Activités de l'Envoyé personnel du Secrétaire général

2. Pendant la période considérée, dans l'attente d'une décision du Conseil de sécurité concernant le choix d'une des options soumises à son examen dans mon rapport du 19 février (S/2002/178), mon Envoyé personnel, M. James A. Baker III, n'a pas eu de contact direct avec les parties. Je pense que M. Baker sera prêt, sous réserve de la condition énoncée plus bas au paragraphe 22, à reprendre ses activités une fois que le Conseil aura pris une décision quant à la façon dont il souhaite qu'il poursuive ses efforts pour aider à trouver une solution au différend concernant le Sahara occidental.

III. Évolution de la situation sur le terrain

3. Mon Représentant spécial, William L. Swing, a continué à maintenir régulièrement le contact avec les parties. À Laayoune, il a rencontré régulièrement le Gouverneur Hamid Chabar, Coordonnateur du Royaume du Maroc avec la MINURSO. Les 20 et 21 mars 2002, mon Représentant spécial, accompagné par le commandant de la Force de la MINURSO, s'est rendu dans la région de Tindouf en Algérie où ils se sont entretenus avec le principal responsable du Front POLISARIO chargé des questions de défense, Mohammed Bouhali, et le Coordonnateur du Front avec la MINURSO, Em'hamed Khaddad. Au cours de ses visites à Alger et à Rabat, les 31 mars et 4 et 5 avril, respectivement, M. Swing s'est entretenu avec de hauts responsables algériens et marocains. Le 8 avril, il a eu des entretiens à Nouakchott avec le Président Maaouya Ould Sid' Ahmed Taya de Mauritanie et d'autres hauts responsables du Gouvernement. Le 7 mars, il s'était rendu à Rabat, où il a rencontré séparément les ambassadeurs des cinq membres permanents du Conseil de sécurité et l'Ambassadeur d'Espagne.

A. Activités de la Commission d'identification

4. Au cours de la période considérée, la Commission d'identification a poursuivi, dans ses bureaux de Laayoune et de Tindouf, ses travaux d'archivage électronique des dossiers de toutes les personnes qui ont demandé à être inscrites sur la liste des électeurs pour le référendum au Sahara occidental. Au 15 avril, quelque 71 736 dossiers avaient été archivés, sur un total de 244 643.

B. Aspects militaires

5. Au 15 avril 2002, la composante militaire de la MINURSO comptait 230 militaires, soit l'effectif autorisé (voir annexe). Sous le commandement du général de brigade Claude Buze (Belgique), la MINURSO a continué de surveiller le cessez-le-feu entre l'Armée royale marocaine et les forces militaires du Front POLISARIO qui est entré en vigueur le 6 septembre 1991. Aucun indice sur le terrain ne donne à penser que l'une ou l'autre partie entende reprendre les hostilités dans un avenir proche.

6. Durant la première partie de la période considérée, les discussions se sont poursuivies entre la MINURSO et le Front POLISARIO, à divers niveaux, en vue de lever les restrictions imposées par ce dernier depuis janvier 2001 à la liberté de mouvement des observateurs militaires des Nations Unies à l'est du mur de défense. Lors d'une réunion tenue le 21 mars, le Front POLISARIO a informé mon Représentant spécial de sa décision de lever ces restrictions. Mon Représentant spécial s'est félicité de cette décision encourageante. La MINURSO a été avisée que les restrictions seraient effectivement levées à la fin du mois d'avril, et qu'à cette date tous les niveaux de la chaîne de commandement, les membres du Front POLISARIO auraient été dûment informés de la décision de leurs dirigeants. En conséquence, une réunion de coordination entre le général Buze et les militaires du Front POLISARIO doit se tenir prochainement, pour assurer la mise en place des dispositions finales en vue du plein rétablissement de la liberté de mouvement des observateurs militaires des Nations Unies à l'est du mur de défense.

7. À l'ouest du mur de défense, les patrouilles militaires de la MINURSO ont continué de visiter et d'inspecter les unités terrestres de l'Armée royale marocaine d'importance supérieure à celle d'une compagnie, conformément aux arrangements de cessez-le-feu conclus entre la MINURSO et l'Armée royale marocaine.

C. Police civile

8. Au 15 avril, la composante police civile de la MINURSO comptait 25 membres (voir annexe) placés sous le commandement de l'Inspecteur général Om Prakash Rathor (Inde). Les membres de la police civile ont continué d'assurer, 24 heures sur 24, la protection des dossiers et des documents confidentiels aux centres de la Commission d'identification à Laayoune et à

Tindouf.

D. Préparatifs en vue du rapatriement des réfugiés sahraouis

9. Pendant la période considérée, mon Représentant spécial s'est rendu au siège de plusieurs organisations s'occupant des aspects humanitaires du conflit du Sahara occidental. Le 28 février et le 6 mars, il s'est entretenu avec de hauts fonctionnaires du Programme alimentaire mondial (PAM) et de l'Office d'aide humanitaire de la Commission européenne (ECHO) à Rome et à Bruxelles, respectivement, des problèmes persistants d'approvisionnement alimentaire des réfugiés sahraouis dans les camps de Tindouf. Les 5 et 31 mars, il a rencontré des fonctionnaires du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) à Genève et à Tindouf, respectivement, afin d'examiner la situation humanitaire d'ensemble dans les camps de réfugiés et de s'enquérir des perspectives d'application de mesures de confiance transfrontières. J'ai le regret d'informer le Conseil qu'il n'y a aucun progrès à signaler jusqu'ici au sujet de ces mesures en raison de l'absence de consensus sur la question.

10. Durant la période considérée, le HCR a continué à assumer les responsabilités qui lui avaient été confiées à l'égard des réfugiés sahraouis dans les camps de Tindouf et à coordonner son action avec celle de la MINURSO. À la suite des deux ateliers sur le droit international concernant les réfugiés qui se sont tenus dans la région de Tindouf en 2001, le HCR a organisé un autre atelier à Alger, le 27 février 2002, en présence de fonctionnaires algériens et de représentants de réfugiés, en vue de renforcer sa capacité de protection et d'établir un cadre d'asile plus efficace dans le pays hôte. Deux autres ateliers ont eu lieu en mars 2002 afin d'améliorer la coordination entre le pays hôte, les principaux donateurs et les organisations humanitaires.

11. Durant la période considérée, la situation en matière d'approvisionnement alimentaire est restée précaire en raison de la difficulté persistante d'assurer une filière d'approvisionnement alimentaire adéquat et équilibré pour les réfugiés. La réduction de l'aide humanitaire en l'absence d'une solution durable de la question du Sahara occidental est restée une préoccupation majeure pour les réfugiés et leurs dirigeants. Aux côtés du PAM, le HCR a coordonné une visite de donateurs dans les camps de Tindouf les 10 et 11 avril 2002. Le 14 avril, le PAM a annoncé un projet d'aide aux réfugiés portant sur une période de deux ans et dont le coût était estimé à 30 millions de dollars &endash; ce qui permettrait de faire parvenir aux réfugiés environ 68 000 tonnes d'aide &endash; qui attendait l'approbation de son conseil d'administration au mois de mai. Une réunion d'information sur le Sahara occidental à l'intention des donateurs est prévue au siège du HCR à Genève le 23 avril.

E. Prisonniers de guerre, personnes portées disparues et détenus

12. Le 5 mars, mon Représentant spécial a eu un entretien à Genève avec de hauts fonctionnaires du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) au sujet des prisonniers de guerre marocains et du sort de toutes les personnes portées disparues depuis le début du conflit. Actuellement, 1 362 prisonniers de guerre continuent d'être détenus par le Front POLISARIO. Sur ce chiffre, quelque 916 personnes sont détenues depuis plus de 20 ans, cette durée d'incarcération étant jusqu'ici la plus longue du monde pour des prisonniers de guerre. Lors de la réunion avec mon Représentant spécial à Genève le 5 mars, le CICR s'est de nouveau déclaré profondément préoccupé par la mauvaise santé physique et mentale des prisonniers.

F. Organisation de l'unité africaine

13. Durant la période considérée, la délégation d'observation de l'Organisation de l'unité africaine auprès de la MINURSO, conduite par l'Ambassadeur Yilma Tadesse (Éthiopie), a continué d'apporter une aide et une coopération précieuses à la Mission. Je tiens à réitérer mes sincères remerciements pour cette contribution.

IV. Autres faits nouveaux

14. Le 27 février, le Président algérien Abdelaziz Bouteflika s'est rendu dans les camps de réfugiés de la région de Tindouf où il s'est entretenu avec les dirigeants du Front POLISARIO et a participé aux festivités marquant le vingt-sixième anniversaire de la « République arabe sahraouie démocratique ». C'était la première fois qu'il était fait état de la visite d'un chef d'État algérien dans les camps de réfugiés depuis que ceux-ci avaient été établis en 1976. Les 5 et 6 mars, S. M. le Roi Mohammed VI s'est rendu dans les villes de Dakhla et de Laayoune dans le territoire, accompagné par le cabinet marocain. À Dakhla, il a présidé une réunion du Conseil des ministres, la première tenue par lui dans le territoire. Dans une allocution télévisée qu'il a prononcée à Laayoune, le Roi a annoncé la création d'une nouvelle agence pour le développement social et économique du territoire. Le Secrétaire général du Front POLISARIO, Mohamed Abdelaziz, a protesté contre la visite du Roi dans une lettre qu'il a adressée le 4 mars au Président du Conseil de sécurité.

15. Dans mon dernier rapport, j'ai informé le Conseil qu'à la fin de décembre 2001, des détenus sahraouis avaient entamé une grève de la faim de trois semaines dans la prison de Laayoune en vue d'obtenir de meilleures conditions de vie carcérale. Cette grève s'est arrêtée le mois suivant, après que les autorités marocaines eurent pris une série de mesures pour améliorer les conditions d'incarcération.

V. Aspects financiers et logistiques

16. Par sa résolution 55/262 du 14 juin 2001, l'Assemblée générale a ouvert, aux fins du fonctionnement de la MINURSO du 1er juillet 2001 au 30 juin 2002, un crédit d'un montant de 48,8 millions de dollars, à raison d'un montant d'environ 4,1 millions de dollars par mois. Compte tenu des réductions récentes du personnel, je continuerai à réévaluer les besoins en ressources de la Mission et soumettrai à l'Assemblée générale les ajustements qui en découlent, si nécessaire.

17. Au 31 mars 2002, le montant des contributions non acquittées au compte spécial de la MINURSO s'élevait à 56 558 258 dollars. Le montant total des contributions non acquittées pour l'ensemble des opérations de maintien de la paix se chiffrait à cette date à 1 423 008 273 dollars.

18. L'infrastructure logistique de la MINURSO demeure d'une manière générale satisfaisante, mais certains matériels sont vieux, soit qu'ils approchent de la fin de leur durée de vie utile, soit qu'ils aient dépassé celle-ci. L'évolution des besoins logistiques a également conduit la Mission à installer trois stations terrestres de communication aux bases d'opération des équipes d'observateurs militaires, à améliorer certains matériels informatiques et moyens d'hébergement dans divers emplacements situés dans la Mission, et à améliorer les conditions de sécurité au quartier général à Laayoune. Toutefois, de nouvelles améliorations restent nécessaires. En attendant une décision du Conseil de sécurité concernant la prorogation du mandat de la MINURSO, une équipe d'assistance technique du Siège de New York devrait se rendre auprès de la Mission dans un avenir proche afin d'en évaluer les besoins logistiques.

VI. Observations et recommandations

19. Les aspects humanitaires de la situation générale en ce qui concerne la question du Sahara occidental restent très préoccupants. Le fait que 1 362 prisonniers de guerre demeurent en détention constitue toujours un des problèmes humanitaires les plus pressants. Comme le Conseil le sait, j'ai déjà demandé à mon Représentant spécial d'aider le CICR à s'acquitter de ses tâches les plus critiques. J'espère sincèrement que les membres du Conseil se joindront à moi une fois de plus pour demander instamment au Front POLISARIO de libérer sans plus tarder tous les prisonniers de guerre restants. J'espère aussi que les deux parties continueront de coopérer avec le CICR dans l'action que celui-ci mène pour résoudre le problème du sort de tous ceux dont on est sans nouvelles depuis le début du conflit.

20. Vu le niveau actuellement bas de l'approvisionnement en vivres dans les camps de réfugiés du secteur de Tindouf, je demande par ailleurs instamment à la communauté internationale de renforcer son appui financier afin de permettre au HCR et au PAM de faire face aux besoins humanitaires des réfugiés. Comme il est indiqué plus haut au paragraphe 9, mon Représentant spécial se tient en relation étroite avec le HCR et le PAM afin d'aider à trouver une solution à ce problème. Parallèlement, je compte sur le Maroc et le Front POLISARIO pour apporter sans plus tarder leur coopération au HCR en vue de la mise en oeuvre des mesures de confiance, qui n'a été que trop longtemps différée alors que le Conseil de sécurité l'a demandée à plusieurs reprises depuis 1999. On ne saurait faire moins face au sort tragique des familles de réfugiés qui se trouvent séparées.

21. J'espère que le Conseil de sécurité décidera, d'ici la fin du mandat actuel, comment il compte procéder en ce qui concerne l'avenir du processus de paix au Sahara occidental, et qu'il prendra une décision, selon qu'il conviendra, sur le mandat de la MINURSO. Je pense qu'en choisissant la solution qui lui paraîtra avoir le plus de chances d'aider à régler le conflit, il fera savoir aux parties qu'il est décidé à s'employer activement à rechercher une solution réaliste qui permette non seulement de régler le conflit mais aussi d'aider à assurer durablement la paix, la stabilité et la prospérité dans le Maghreb.

22. Mon Envoyé spécial se tient prêt à entreprendre les activités qui lui incomberont selon l'option choisie par le Conseil de sécurité, en vue de diriger les parties vers le règlement de leur différend concernant le Sahara occidental, à condition que le Conseil n'entende apporter à celle des trois options qu'il aura retenue aucune modification qui nécessiterait l'assentiment des parties. Comme il l'a indiqué au Conseil le 27 février 2002, de telles modifications ne feraient que pousser à la poursuite du conflit et au maintien de l'impasse actuelle. Comme toujours, je compte lui apporter un soutien sans réserve dans l'accomplissement de sa tâche délicate.


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