Frente Popular para la liberación de Saguia el Hamra y Rio de Oro

Frente Polisario

 

MÉMOIRE SUR LES PROPOSITIONS DE RÈGLEMENT DU SECRÉTAIRE GÉNÉRAL DES NATIONS UNIES.

Mai 1999

Le contexte:

La reprise du processus de règlement au Sahara Occidental à la faveur des accords de Houston intervenus en septembre 1997, devait conduire selon les prévisions initiales à l'organisation du référendum en décembre 1998. Cela supposait la fin des opérations d'identifications des personnes habilitées à participer au référendum le 31 mai de la même année.

Néanmoins, les retards de tous ordres imposés par la partie marocaine à la mise en oeuvre des différentes phases du plan de règlement et ses multiples tergiversations n'ont pas permis le respect du calendrier ainsi arrêté. Plus grave, l'une des principales dispositions des accords de Houston relative au compromis sur l'identification des tribus contestées (H41, H61 et J51/52), et qui limitait au strict minimum leur participation au processus d'identification , a été dénaturée, et finalement complètement mise en échec par une volonté déclarée d'enterrement de l'ensemble du processus.

Pour rappel, les tribus contestées (au total 88), sont représentées dans le recensement espagnol de 1974 par un millier de personnes, alors que le Maroc présente plus de 65'000 demandes d'identification au nom de personnes se réclamant de ces tribus. Ces dizaines de milliers de personnes vivent dans leur quasi totalité jusqu'à ce jour au Maroc, et n'ont, en fait, aucun lien avec le Sahara Occidental.

La Commission d'identification a achevé, le 03 septembre 1998, la convocation de l'ensemble des candidats portés sur les listes tel qu'indiqué dans le rapport du Secrétaire Général du 13 novembre 1997. Elle a ainsi identifié au total 147 000 personnes parmi lesquelles une liste provisoire d'électeurs a pu être dégagée. L'absence d'une mise en oeuvre effective du compromis de Houston sur l'identification des tribus contestées et les retards enregistrés sur les autres éléments du plan de règlement , ont conduit le processus, en dépit des progrès enregistrés, vers une nouvelle situation de blocage.

L'initiative du Secrétaire Général des Nations Unies:

C'est dans ce contexte qu'interviennent les propositions du Secrétaire Général transmises aux parties, en octobre 1998, par le Secrétaire Général adjoint aux opérations de la paix. S'inscrivant dans le cadre des efforts de l'ONU pour achever la décolonisation du Sahara Occidental, cette initiative de M. Kofi ANNAN a pour objectif la relance du processus de règlement par:

La proposition d'un nouveau compromis pour l'identification de tous les membres des tribus contestées, réclamée par le Maroc.
La mise en oeuvre simultanée des autres phases du plan de règlement, et en particulier les opérations d'appel pour les personnes déjà identifiées.
Pour ce faire, ces propositions de règlement, qui ont été présentées aux parties sous forme d'un paquet de mesures, s'articulent autour de quatre protocoles, à savoir:

Accord solennel du Front POLISARIO et consensus international autour des propositions du Secrétaire Général des Nations Unies.

1 M. Kofi ANNAN s'est rendu lui même, en novembre et en décembre, dans la région pour donner à son initiative le poids politique nécessaire et obtenir solennellement l'accord des deux parties sur ses propositions.

2 Faisant preuve de l'esprit de coopération et de responsabilité qui l'a toujours animé, le Front POLISARIO a réservé un accueil favorable à cette initiative lors de la visite du Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix aux différents pays de la région. Un accord formel a été, par la suite, donné à M. ANNAN lors de sa visite en novembre-décembre dans la région.

3 Ces propositions du Secrétaire Général, qui ont été soutenues par l'Algérie et la Mauritanie en tant qu'observateurs officiels du processus de règlement, ont été endossées par le Conseil de sécurité à travers sa résolution 1204, et appuyées par la Communauté internationale de manière générale.

4 En acceptant l'arbitrage du Secrétaire Général, le Front POLISARIO a fait une concession majeure, en acceptant une revendication marocaine qu'il a toujours rejetée, à savoir l'identification de dizaines de milliers de personnes qui n'ont aucun lien avec le Sahara Occidental. Ainsi, il a fait preuve de l'esprit d'ouverture et de la bonne volonté dont il toujours fait montre, aussi bien vis-à-vis du Secrétaire Général que du Conseil de sécurité pour la conduite à terme du processus de règlement au Sahara Occidental.

5 Cet accord, le Front POLISARIO l'a donné, par ailleurs, avec le clair entendement que:

Les quatre protocoles qui composent l'initiative du Secrétaire Général constituent un paquet de mesures dont les principaux éléments sont articulés de manière équilibrée et solidaire, et représentent un tout dont la mise en oeuvre simultanée, est un impératif incontournable.

La Commission d'identification continuera à s'acquitter de sa mission de manière impartiale et honnête. Elle procédera, pour ce faire, à l'application rigoureuse des critères d'identification et des autres procédures convenues.

Les tergiversations de la partie marocaine:

6 La mise en oeuvre de ces propositions devait intervenir dès le 1er décembre 1998, par la publication de la liste provisoire des électeurs qui donnera le signal des opérations de recours et le démarrage de l'identification des membres des groupements tribaux contestés. Les tergiversations et les atermoiements de la partie marocaine n'ont pas permis encore une fois, la concrétisation de cette initiative dans les délais. Après avoir réservé un accueil positif aux propositions transmises par le Secrétaire général adjoint aux opérations de maintien de la paix , le Maroc a multiplié les réserves et autres demandes de clarification.

7 Cette attitude est d'autant plus incompréhensible et injustifiable, que le Maroc obtient, à travers ces nouvelles mesures, pleine satisfaction sur une demande essentielle, à savoir l'identification de l'ensemble des membres des groupements tribaux H41, H61 et J51/52 que le Front POLISARIO a, régulièrement, récusé par le passé.

8 Face à ces atermoiements, la Communauté internationale et le Conseil de sécurité ont, à plusieurs reprises, appelé le Maroc à rallier le large consensus dont ont bénéficié les propositions du Secrétaire Général. Appels auxquels le Maroc a opposé ses manoeuvres traditionnelles tendant à repousser, autant que faire se peut, la traduction des propositions du Secrétaire Général sur le terrain, en érigeant de nouveaux obstacles et en cherchant une mise en oeuvre sélective de ces propositions. Entre-temps, des mois se sont écoulés et le processus est resté au point mort.

Les changements apportés aux nouveaux textes des propositions:

9 Des discussions ont été engagées entre le Secrétariat des Nations Unies et la partie marocaine à la suite des questions et des demandes de clarifications exprimées par celle-ci. Encore une fois, le Front POLISARIO a accepté que des changements puissent être apportés aux textes initiaux qu'il a déjà avalisés. La seule condition qu'il a alors posée est celle que le Secrétariat lui même a maintes fois réitérée et que le Conseil de sécurité n'a eu de cesse de réaffirmer à travers ses résolutions successives 1215,1228 et 1235, à savoir le respect de l'intégrité du paquet de mesures et la préservation de ses principaux éléments.

10 Lors de ces discussions, qui ont porté sur les protocoles et les procédures d'identification et de recours en particulier, Le Secrétariat des Nations Unies a fait montre d'un grand esprit d'ouverture et de conciliation. Le POLISARIO n'a ménagé, de son côté, aucun effort à même de permettre la réalisation d'un accord général sur l'ensemble des protocoles et leur mise en oeuvre simultanée dans les meilleurs délais.

11 Des changements importants ont été apportés aux textes originaux des deux protocoles. Les directives opérationnelles s'y rapportant et notamment celles concernant les opérations de recours ont, dans certains cas, introduit des éléments et des procédures, à certains égards complètement nouveaux.

12 Plusieurs des dispositions ainsi aménagées ou nouvellement introduites, facilitent les procédures de recours, accordent une large place aux parties dans le processus et limitent la responsabilité des requérants. A travers ces changements, les nouvelles procédures pourraient conduire, paradoxalement à l'affaiblissement de la Commission d'identification et des sections de recours. Cependant, de toutes ces dispositions nouvellement introduites, c'est sans contexte la place et le statut accordés désormais au témoignage oral en tant que mode de preuve, et n'importe quel requérant peut se prévaloir, qui posent problème.

Les risques engendrés par l'introduction de la nouvelle formule du témoignage oral en tant que moyen de preuve.

13 Par cette nouvelle formule du témoignage oral, tout requérant peut faire appel à deux témoins et revendiquer le contenu de leur témoignage comme élément nouveau pour la recevabilité de son recours, et comme élément de preuve pour mettre en cause, lors de l'examen du fond, la décision de la commission d''identification qui 'a débouté dans la phase d'identification. La même hypothèse est envisageable dans les recours contre l'inclusion de candidats déjà portés sur la liste des personnes habilitées à voter.

14 A rappeler que par le passé, seules les preuves matérielles, et particulièrement les documents délivrés par les autorités coloniales espagnoles ou, exceptionnellement le témoignage des Chioukh, étaient considérés par la Commission d'identification comme preuve pouvant établir le droit d'éligibilité, sous l'un quelconque des critères.

15 Cette introduction du témoignage oral et le statut du moyen de preuve autonome qui lui est désormais conféré, ne repose, en fait, sur aucune base légale ou justification pratique. En effet, aucune référence ou base dans les documents des Nations Unies ou dans les procédures agréées par les deux parties n'autorise son adoption dans les formes et les conditions indiquées par les nouveaux textes. Le paragraphe 32 de l'annexe du rapport nƒ 23299 du 19 décembre 1991 stipule:

«la présentation de documents officiels connus et utilisés par les sahraouis, pourra aider la Commission à se prononcer. En outre, celle-ci tiendra compte que, dans la société sahraouie, les témoignages oraux jouent un rôle important dans tous les actes de la vie sociale. Ces témoignages déposés dans des conditions appropriées, constitueront, également un élément d'appréciation des demandes individuelles».

16 Cette même disposition est reprise dans le paragraphe 14 du rapport du Secrétaire Général Nº 26185 du 28 juillet 1993, qui donne l'interprétation des «conditions appropriées».

17 En tout état de cause, et quel que soit le critère, le témoignage oral n'a qu'une portée complémentaire et d'appoint à des preuves documentaires jugées incomplète ou insuffisantes. Il n'est surtout reconnu qu'aux seuls Chioukh experts présentés par les deux parties, tel que le précise de manière sans équivoque, le paragraphe 20 du même rapport (26185):

«Les Chioukh des sous-fractions sahraouies incluses dans le recensement de 1974 seront seuls habilités à témoigner auprès de la Commission d'identification à l'appui des demandes individuelles de participation au référendum. Ils se prononceront sur toutes les demandes, en jurant solennellement de dire la vérité toute la vérité rien que la vérité».

18 En plus de l'absence de tout fondement juridique ou justification pratique, l'adoption du témoignage oral dans sa nouvelle version en tant que mode de preuve, présente un danger réel de transformer les opérations de recours en une identifications bis et, plus grave encore, pourrait aboutir à une remise en cause du travail laborieusement accompli par la Commission d'identification durant des années. Des milliers, voire des dizaines de milliers de requérants déboutés lors de la phase d'identification, pourraient y trouver un moyen facilement accessible pour déposer un recours qui, en fait, ne reposerait sur aucune justification vérifiable, si ce n'est le récit de deux «témoins»mobilisés pour la circonstance.

Les conditions nécessaires pour la poursuite du processus sur une base crédible et efficace.

19 Le Front POLISARIO a porté l'ensemble de ces éléments et de ces considérations à l'attention du Secrétariat des Nations Unies. Il continue de croire que, malgré les améliorations introduites dans les nouveaux textes pour limiter de tels risques et les assurances données par le Secrétariat à ce sujet, le danger d'une multiplication sans fin des procédures de recours existe toujours. Il pourrait conduire de plus, si l'on n'y prend garde, au dévoiement de l'ensemble du processus et à mettre à rude épreuve la commission d'identification et l'action de l'ONU au Sahara Occidental de manière générale.

20 En dépit de tout cela, le Front POLISARIO a communiqué, par lettre en date du 28 avril 1999 son acceptation formelle des protocoles révisés tels qu'annexés à la lettre du Secrétaire Général aux parties, datée du 26 avril, avec l'entendement que:

21 Le Front POLISARIO attire l'attention aussi bien de l'ONU que de la Communauté internationale, sur les dangers réels qu'encourt une nouvelle fois le processus de règlement au Sahara Occidental, si ces conditions essentielles ne sont pas strictement observées. Le soutien et la vigilance de la Communauté internationale pour la reprise rapide mais ordonnée du processus de règlement , selon les procédures et les règles convenues, ne pourront que raffermir l'action de l'ONU et les efforts entrepris pour hâter la mise en oeuvre des autres éléments du plan de règlement dans les délais requis.


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