CONFERENCE INTERNATIONALE DE SOUTIEN AU PLAN DE PAIX AU SAHARA OCCIDENTAL


Intervention de
M. Abdeslam Zaer, Coordinateur de
l'Association des Familles de Prisonniers et Disparus Sahrauis ,
AFAPREDESA

26.09.1997

Chers Amis du peuple sahraoui,

J'ai le plaisir et l'honneur de présenter devant cette Conférence Internationale un bref exposé sur la situation des droits humains au Sahara Occidental. Mais avant tout, je tiens à adresser mes salutations chaleureuses et mes remerciements à tous, pour votre grande solidarité avec le peuple sahraoui depuis l'invasion marocaine le 31 octobre 1975.
Un hommage particulier aux personnes qui ont rendu possibles quelques succès dans le domaine des droits humains dans les territoires occupés du Sahara Occidental ces dernières années.

Cette Conférence a lieu à un moment crucial de l'histoire du peuple sahraoui. D'ici quelques jours, on saura si le Plan de Paix sera la solution du conflit. Depuis plus de deux décennies, les autorités marocaines commettent de graves violations des droits humains. Les exactions cruelles et inhumaines comme les massacres perpétrés par l'armée marocaine ont causé des milliers de victimes et entraîné l'exode massif des survivants dans la région de Tindouf (Algérie), à la recherche d'un refuge pour se protéger de la barbarie marocaine.
Durant toutes ces années, le Maroc a violé, et continue de violer les droits de l'homme et les libertés fondamentales. Des milliers de détenus, des centaines de disparus, déportés, et toute une population privée de tout moyen de contact avec l'extérieur. Tout prétexte suffit pour que n'importe quel sahraoui puisse être conduit dans les centres de détention secrets: avoir un membre de sa famille dans le Front POLISARIO, participer à une manifestation, écrire à ou écouter "Sahara Libre". Personne n'est à l'abri de ces exactions: enfants, vieillards, femmes et hommes de tous les âges et de toutes les professions. De l'élève à l'étudiant, de l'ouvrier au commerçant, du marin au soldat. Tous ont été l'objet de mauvais traitements et de la torture. La répression a atteint une telle ampleur qu'il n'y a pas un sahraoui qui n'ait été affecté de près ou de loin par les arrestations arbitraires. Presque la totalité des personnes détenues ne passent pas en jugement, la majorité disparaissent. Jusqu'à ce jour, l'AFAPREDESA est toujours sans nouvelles de centaines de disparus, bien que de nouveaux éléments laissent penser que certains disparus sont encore en vie. Durant de nombreuses années, le Maroc a essayé de cacher ces faits, mais quand sous la pression de quelques organisations de défense des droits de l'homme et des comités de soutien au peuple sahraoui, il libéra en juin 1991 près de trois cent disparus, la Communauté internationale s'est rendu compte de la réalité. Ce pays n'est pas seulement un petit "paradis" où l'on peut passer d'agréables vacances sous le soleil, mais c'est aussi le pays de l'arbitraire le plus cynique.
Ces libérations ont éveillé de grands espoirs parmi les familles des disparus et les ONG qui défendent le respect des droits humains. Mais la réalité fut autre. Des 310 sahraouis remis en liberté, seuls six ont pu sortir du Maroc clandestinement. Les autres se trouvent dans une grande prison sans barreaux, sous surveillance constante. Ils n'ont pas reçu d'indemnisations; ils n'ont bénéficié d'aucun traitement médical après tant d'années de détention infernale.
Rares sont les cas de sahraouis qui ont été "jugés". Tous ceux-ci passèrent devant des tribunaux sans les garanties juridiques minimales. Nombreux sont les sahraouis qui furent assassinés. Seulement pendant la période écoulée depuis l'installation de la MINURSO dans le territoire, plus de vingt personnes ont été assassinées par les forces d'occupation.
La présence de la Mission des Nations Unies pour le référendum au Sahara Occidental (MINURSO) dans le territoire, depuis le 6 septembre 1991, n'a en rien changé cette situation alarmante.

Le moindre contact avec les casques bleus entraîne l'arrestation arbitraire, la torture, et même la disparition ou la liquidation physique. De surcroît, des milliers de sahraouis ont été privés de leurs droits à participer au référendum prévu. Des centaines de sahraouis ont rempli les formulaires de candidature dans les centres d'identification marocains: pourtant ils ne figuraient plus sur les listes des personnes convoquées par la Commission d'identification. D'autres figuraient sur ces listes, mais les autorités leur empêchèrent l'accès; aux centres d'identification de la MINURSO. (Rapport de l'ambassadeur américain Franck Ruddy, vice-président de la Commission d'Identification).

Chers Amis,
Devant de tels faits, face à une telle situation, nous sommes très inquiets. Il est vrai que M. James Baker, l'envoyé spécial de Secrétaire Général de l'ONU, a réalisé un pas important en asseyant les deux parties en conflit autour d'une table de négociations directes, qui se sont terminées par la signature d'un accord pour l'application du plan de paix. Mais comme nous le savons tous, les accords n'ont jamais manqué, bien qu'ils furent toujours bloqués par le Maroc. S'agit-il d'une nouvelle manoeuvre? Pour toutes ces raisons, la population sahraouie ne pourra se rendre aux urnes alors que dans le même temps elle est persécutée et menacée par les agents marocains.

1. Quelles sont les garanties qui seront données aux sahraouis pour pouvoir s'exprimer, circuler et choisir par eux-mêmes leur destin en toute liberté durant et après l'opération référendaire?

2. Comment garantir que les différents appareils répressifs n'interviendront pas au cours de toute l'étape référendaire?

Eloigner les services et les organes d l'Etat marocain, responsables de graves violations des droits humains au Sahara Occidental est une de ces garanties. Et en particulier, concernant l'Armée marocaine, la Direction de Sécurité du territoire (DST), la Police Judiciaire (PJ), la gendarmerie Royale et le Compagnies Mobiles d'Intervention (CMI), responsables à elles seules de plus de 90% des arrestations effectuées au Sahara Occidental.
La libération de tous les prisonniers de conscience sahraoui, la restitution des restes mortels de ceux qui seraient décédés durant leur détention illégale à leurs familles et le jugement de ceux qui sont impliqués dans les violations des droits humains en est une autre.
Finalement le libre accès au territoire à toutes les organisations de défense des droits de l'homme, aux observateurs indépendants et à la presse internationale est indispensable.

Pour toutes ces raisons, nous faisons les propositions suivantes. 1. La question des disparitions forcées doit être résolue avant le début de la période référendaire.
2. Il faut garantir que les restes mortels des personnes décédées dans les geôles marocaines soient rendus à leurs familles.
3. Il faut garantir que les victimes de la torture et de mauvais traitements soient indemnisées et soignées comme il se doit.
4. Il faut garantir la présence massive d'ONG de défense des droits de l'homme, d'observateurs indépendants et de la presse internationale, avant et pendant toute la période référendaire. Pour cela, il faut sensibiliser par des actions concrètes;:

5. Aide matérielle à l'AFAPREDESA, comme ONG qui se trouve sur le terrain, pour qu'elle puisse mener à bien son travail de dénonciation de toute violation des droits humains.

Ce n'est que si ces conditions sont données, loin de toute pression civile ou militaire, qu'il sera possible que se déroule un référendum juste et régulier. Je vous remercie.

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