L'Echo du POLISARIO
No 3, avril 1996

Edité par la Représentation du F. POLISARIO en France
11, rue Le Châtelier, 75017 Paris, tél : +33.1. 44 15 99 46

 


Editorial

Le roi Hassan II du Maroc sera à Paris les 6 et 7 mai prochains pour une visite de travail. Annoncé pour novembre 1995, ce voyage officiel avait été reporté en raison de l'aggravation de l'état de santé du souverain marocain. Cette rencontre entre le souverain marocain et le président français, est donc attendue, de longue date.
L'excellence des rapports qu'entretiennent le président Jacques Chirac et le roi du Maroc, place la France aujourd'hui dans une position de choix; le président français devrait jouer le rôle médiateur, attendu par la communauté internationale, pour amener Rabat à réviser sa politique quant au règlement de la question du Sahara occidental - incertitude qui nous préoccupe avant toute autre.
L'occupation artificielle du territoire sahraoui demande au Maroc un effort qu'il ne peut fournir sans gravement hypothéquer son propre développement et menacer les intérêts, notamment français, dans le pays. L'état de santé critique du souverain marocain, la crise généralisée qui submerge le Maroc, l'instabilité politico-militaire de la région aggravée par l'échec du plan de règlement de l'ONU et de l'OUA presque consommé, sont autant de facteurs qui devraient amener le Maroc à opter pour une solution sage: se débarrasser du Sahara Occidental.
Le roi Hassan II dont l'intelligence politique est réputée, saura-t-il saisir cette occasion pour trancher le nud gordien ? Le geste est urgent et crucial.
Je crois qu'il est temps de se souvenir qu'à Marrakech, le 4 janvier 1984, le roi Hassan II nous disait qu'il ne laisserait pas le conflit du Sahara Occidental sur les bras de son héritier. Il est donc fort probable qu'il veuille lui-même refermer le dossier qu'il a ouvert.
Que la guerre reprenne et le risque est grand qu'elle survive au roi malade.
Or justement, les sahraouis sont de plus en plus nombreux à ne voir d'autre issue que la reprise des combats. Ils se sentent trahis et déçus, honteux de cet excès d'optimisme qui leur avait fait accepter le cessez-le-feu en contrepartie d'une simple attestation de bonne foi. Ils ont cru dans le déroulement sans détour du plan de paix pour le Sahara occidental. Aujourd'hui, ils disent avoir péché par excès d'optimisme et paient cette erreur: le temps perdu, le relâchement général, l'isolement médiatique Parall&egravelement, le Maroc renforce tranquillement ses positions militaires, sous le nez des observateurs impassibles de la Minurso.
Mais qui veut la guerre? Aucun sahraoui ne souhaite se voir réduit à cette dernière extrémité, cette sombre perspective n'enchante personne. La fin du règne de Hassan II approchant inquiète d'autant plus qu'elle arrive alors qu'il y a encore tout à faire La paix actuelle n'est pas la Paix. Le Grand Maghreb n'est pas construit.
Il y a un avenir à préparer pour que le Maghreb puisse affronter les défis du XXIe siècle Cet avenir, préparons-le ensemble! Ayons le courage de faire la paix et de la maintenir. Ayons la volonté de nous réconcilier et de faire-valoir notre complémentarité.
Il faut donner à chaque peuple sa place dans l'édifice maghrébin, à commencer par le peuple sahraoui, et faire en sorte que tous les partenaires de la région sortent gagnants -y compris la France- de cette affaire.
Et les fr&egraveres-ennemis d'hier deviendraient les frères-amis de demain...

Fadel ISMAÏL.


La RASD prête à contribuer aux efforts de paix de la France

Le Président Jacques Chirac, récemment à Beyrouth, a insisté sur la "vocation" de la France à "être un acteur important dans l'élaboration d'une grande politique méditerranéenne, tendant à développer dans l'ensemble du pourtour méditerranéen une zone de paix, de liberté de développement et de stabilité".
Nous nous félicitons de cette déclaration. cependant, on ne saurait réaliser la paix au Maghreb tant que le problème du Sahara Occidental demeure. Aujourd'hui, le plan de règlement de l'ONU et de l'OUA est en train d'échouer. D'ailleurs, la mission des Nations Unis pour l'organisation du référendum d'autodétermination au Sahara Occidental (MINURSO) a réduit de moitié les effectifs de la commission d'identification des électeurs et ceux de la police civile.
L'ONU semble jeter l'éponge tandis qu'aucune volonté politique n'a été mise en uvre pour appliquer ce plan de paix, d'autre part, continuer à considérer le Maroc comme l'"îlot de stabilité" de la région n'est pas réaliste. Ce pays s'essouffle dans l'effort à fournir pour maintenir artificiellement le Sahara Occidental sous son contrôle. La crise s'y généralise et ouvre la porte à toutes les incertitudes.
La République sahraouie, soucieuse de voir la paix et la stabilité s'établir y compris au Maroc, appelle la France à oeuvrer dans ce sens. Tandis que la guerre menace de reprendre, nous espérons beaucoup de cette volonté de la France, de replacer les relations franco-maghrebines dans un cadre nouveau, plus à même de garantir la stabilité de la région.



COUP D'OEIL...

Algérie : où est la France?

Robert Pelletreau, le secrétaire d'Etat américain adjoint chargé du Proche-Orient, est venu délivrer un "message officiel" du président américain Bill Clinton au président algérien Liamine Zeroual, les 18 et 19 mars à Alger. Cette visite a été saluée par le président de la République algérienne comme une "normalisation à haut niveau" des relations entre les deux pays.
Trois jours après la signature d'un contrat pétrolier d'un milliard de dollars entre la compagnie algérienne Sonatrach et la compagnie américaine ARCO pour l'exploitation d'un gisement de pétrole à Khourd El-Baguel, la venue du secrétaire d'Etat américain adjoint à Alger montre la nouvelle vigueur des relations entre les deux Etats.
Si Philippe Seguin s'est dit soucieux d'unité maghrébine à Rabat le 2 mars dernier, Paris aura, quant à elle, mené une politique séparatiste marquant clairement ses préférences pour le Maroc et la Tunisie au détriment de l'Algérie. Le président Jacques Chirac réservait à Rabat ses premiers pas de chef d'Etat sur le continent africain, en juillet 1995, les bras chargés des meilleures intentions. La Tunisie recevait elle aussi son "enveloppe" et les compliments du président français, à Tunis, en octobre 1995.
Paris boudait Alger malgré l'urgente nécessité qu'un dialogue s'établisse entre le gouvernement algérien et la France, profondément touchée par la crise algérienne. Aussi les relations de la France avec l'Algérie, pour être  "normales" selon un porte-parole du ministère des affaires étrangères français, attendent d'être elles aussi renforcées par une visite de M. de Charette qui semble n'avoir pas encore arrêté de date. Le président de l'Assemblée nationale est-il le seul officiel français à s'être rendu en Algérie depuis l'élection, en novembre 1995, du président Liamine Zeroual.
En conséquence, la France apparaît reléguée au second plan des tractations économiques auxquelles se livrent les compagnies étrangères sur le marché des hydro-carbures algériens. Selon le quotidien algérien Liberté (4/1/96) "L'Italie pourrait ravir à la France la place de premier partenaire commercial de l'Algérie".
En effet le groupe pétrolier et gazier italien ENI prévoit des investissements pour un montant approchant les 3,5 milliards de dollars au cours des quatre prochaines années en Algérie et en Egypte (AFP). Le lendemain d'une rencontre entre M. Werner Hager, le secrétaire d'Etat allemand aux Affaires étrang&egraveres, et le président algérien Liamine Zeroual, les deux pays ont également signé, en Algérie, le 13 mars dernier, un accord portant sur l'encouragement et la protection mutuelle des investissements (AFP). La banque espagnole Banesto vient, elle aussi, d'accorder un prêt, à 7% sur dix ans, de 156 millions de dollars à la Sonatrach pour lui permettre d'investir en biens de services espagnols.
C'est en marge des cérémonies à la mémoire de François Mitterrand, que M. de Charette, le chef de la diplomatie française a enfin rencontré son homologue algérien, Ahmed Attaf à la mi-janvier. Ces discussions concluant au "respect mutuel, la non-ingérence dans les affaires du voisin, l'amitié et la coopération" ont un peu apaisé le choc provoqué en Algérie par la déclaration que fit Jacques Chirac au lendemain du "rendez-vous manqué" avec Liamine Zeroual en octobre 1995, de "proportionner son aide" à l'Algérie à la mesure de ses progrès démocratiques (Le Monde 24/1/96).
Henri BROUST.

Recommandations...

Lors d'une conférence tenue à Alger, le 20 mars, Robert Pelletreau disait aux journalistes de la radio Sahrarouie l'impatience des Etats Unis de voir respectées les résolutions de l'ONU sur le Sahara Occidental (l'OEil du POLISARIO, N°2, mars 1996) .On se souvient des conseils délivrés par M. Pelletreau à Rabat, le 11 décembre 1995, de considérer avec attention la "réémergence" politique et économique de l'Algérie. Lourde de sens, cette remarque faisait suite au gel des activités de l'UMA préconisé par le Maroc en réponse à l'intervention de l'Algérie devant le Conseil de Sécurité de l'ONU, en décembre dernier, pour marquer sa désapprobation quant au contenu du rapport du secrétaire général Boutros Boutros-Ghali sur la situation au Sahara occidental (S.1995.986). A ce propos M. Pelletreau avait précisé à ses interlocuteurs marocains que les Etats-Unis souhaitaient " que le référendum sur le Sahara puisse être considéré comme légitime et non pas manipulé et pour cela il serait évidemment préférable que toutes les parties concernées soient d'accord sur les conditions dans lesquelles celui-ci se déroulera".


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