Nations Unies
Conseil de sécurité

S/2002/178

Distr. générale

19 février 2002
Français
Original: anglais

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Rapport du Secrétaire général sur la situation concernant le Sahara occidental

 

I. Introduction

1. Le présent rapport est soumis en application de la résolution 1380 (2001) du Conseil de sécurité, en date du 27 novembre 2001, par laquelle le Conseil, prenant note de la lettre que j'ai adressée à son Président le 12 novembre 2001 (S/2001/1067), a prorogé le mandat de la Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) jusqu'au 28 février 2002. Le Conseil a aussi réaffirmé sa résolution 1359 (2001) du 29 juin 2001 et ses précédentes résolutions sur la question du Sahara occidental, et m'a prié de le tenir informé de tout fait nouveau important dans un rapport intérimaire présenté au plus tard le 15 janvier. Le Conseil m'avait demandé de faire le point de la situation et, s'il y avait lieu, de faire des recommandations sur le mandat et la composition futurs de la Mission. Le présent rapport décrit les faits survenus depuis mon rapport intérimaire au Conseil, daté du 10 janvier 2002 (S/2002/41).

II. Activités de l'Envoyé personnel du Secrétaire général

2. Les 24 et 25 janvier 2002, mon Envoyé personnel, James A. Baker III, s'est rendu au Maroc où il a été reçu deux fois par S. M. le Roi Mohammed VI et des hauts fonctionnaires. Le but de cette visite de mon Envoyé personnel était d'informer les autorités marocaines que l'Algérie et le Front populaire pour la libération de la Saguia el-Hamra et du Rio de Oro (Front POLISARIO) avaient rejeté le projet d'accordcadre, comme le lui avait réaffirmé le Président Abdelaziz Bouteflika d'Algérie lors de la visite de ce dernier à l'Institut James Baker à Houston (Texas) le 2 novembre 2001, et que, à son avis, l'Algérie et le Front POLISARIO seraient disposés à examiner ou à négocier une division du territoire comme solution politique au différend concernant le Sahara occidental.

3. Au cours de son séjour dans la région, mon Envoyé personnel a saisi l'occasion de visiter brièvement le quartier général de la MINURSO à Laayoune, où il s'est entretenu avec le Représentant spécial que j'ai récemment nommé, William Lacy Swing.

III. Évolution de la situation sur le terrain

A. Activités de mon Représentant spécial

4. Après ses premières réunions officielles avec les autorités marocaines à Rabat et les dirigeants du Front POLISARIO dans la région de Tindouf, mon Représentant spécial a aussi effectué, du 14 au 17 janvier, sa première visite à Alger, où il s'est entretenu avec le Président Bouteflika et de hauts responsables du Gouvernement algérien. À Alger, il s'est aussi entretenu avec des représentants du Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) et du Programme alimentaire mondial (PAM), qui exécutent des programmes d'aide humanitaire dans les camps de réfugiés de Tindouf. Le 27 janvier, il a rencontré à Casablanca une délégation de hauts fonctionnaires du HCR pour discuter des mesures d'instauration de la confiance de part et d'autre de la frontière.

5. Par la suite, le 17 janvier, mon Représentant spécial s'est rendu dans la région de Tindouf, où il s'est entretenu avec le Secrétaire général du Front POLISARIO, Mohamed Abdelaziz, et avec d'autres dirigeants du Front. Il a tenu plusieurs réunions à Laayoune avec le Coordonnateur marocain auprès de la MINURSO. Tous ces contacts entrent dans le cadre des efforts que déploie mon Représentant spécial pour maintenir régulièrement le contact avec les parties.

6. Les 13 et 14 février, mon Représentant spécial a effectué sa première visite officielle à Nouakchott, où il s'est entretenu avec le Président Maaouya Ould Sid'Ahmed Taya de Mauritanie et d'autres hauts responsables du Gouvernement ainsi qu'avec le représentant du HCR en Mauritanie.

B. Procédure de recours

7. Depuis mon dernier rapport au Conseil (S/2002/41), la Commission d'identification a réduit ses effectifs à 40 personnes et a continué de rassembler et de classer tous les renseignements sur les futurs électeurs, qui avaient été recueillis durant leur identification ou à l'occasion de la formation des recours. Elle a procédé à l'archivage électronique des dossiers individuels. Au 31 janvier 2002, le nombre total de dossiers archivés électroniquement tant dans le territoire que dans la région de Tindouf dépassait 43 000. La Commission avait aussi commencé l'examen technique des besoins logistiques au cas où la procédure de recours reprendrait.

C. Aspects militaires

8. Au 7 février 2002, la composante militaire de la MINURSO comptait 230 militaires, soit l'effectif autorisé (voir annexe). Sous le commandement du général de brigade Claude Buze (Belgique), la composante militaire a continué de surveiller le cessezle-feu entre l'Armée royale marocaine et les forces militaires du Front POLISARIO, qui était entré en vigueur le 6 septembre 1991. Il importe de rappeler que depuis l'entrée en vigueur du cessez-le-feu et la mise en place de la MINURSO, les parties n'ont pas repris les hostilités et aucun indice sur le terrain ne donne à penser que l'une ou l'autre partie entende les reprendre dans un avenir proche. La MINURSO a considérablement contribué au maintien du cessez-le feu.

9. Durant la période considérée, les discussions se sont poursuivies entre la MINURSO et le Front POLISARIO, à divers niveaux, en vue d'alléger ou de lever les restrictions imposées par ce dernier à la liberté de mouvement des observateurs militaires des Nations Unies à l'est du mur de défense depuis janvier 2001. Comme il a déjà été signalé au Conseil de sécurité (voir S/2001/148, S/2001/398, S/2001/613 et S/2002/41), les patrouilles terrestres de la MINURSO ne sont pas généralement autorisées à s'approcher de moins de 800 mètres des unités de combat et des postes d'observation du Front POLISARIO, et doivent être escortées à tout moment par les officiers de liaison du Front, qui exercent un contrôle de fait sur les mouvements des patrouilles. D'importants secteurs au sud et à l'est de l'antenne d'Agwanit leur sont également interdits. Les vols de reconnaissance aérienne de la MINURSO sont limités à la zone réglementée de 30 kilomètres immédiatement à l'est du mur de défense, et doivent emprunter les couloirs aériens approuvés par le Front POLISARIO. Malgré les efforts de la MINURSO, on ne peut faire état d'aucun progrès notable dans ce domaine. J'engage le Conseil de sécurité à se joindre à moi pour demander au Front POLISARIO de lever ces restrictions sans délai.

10. À l'ouest du mur de défense, les patrouilles militaires de la MINURSO ont continué de visiter et d'inspecter les unités terrestres de l'Armée royale marocaine d'importance supérieure à celle d'une compagnie, conformément aux arrangements de cessezle-feu conclus entre la MINURSO et l'Armée royale marocaine.

11. Comme le Conseil s'en souviendra, en avril et mai 2001, les autorités militaires marocaines avaient commencé à préparer la construction d'une route asphaltée dans la zone de Guerguerat, à la pointe sudouest du territoire, vers la frontière mauritanienne. Le Maroc a par la suite suspendu les travaux à la demande de plusieurs États Membres et de la MINURSO. Depuis, cette dernière mène régulièrement des patrouilles de reconnaissance terrestre et aérienne de la région (la dernière patrouille aérienne a été effectuée le 26 janvier 2002 et la dernière patrouille terrestre le 1er février 2002), mais n'y a trouvé aucun signe de poursuite des travaux routiers.

D. Police civile

12. Au 7 février 2002, la composante police civile de la MINURSO comptait 25 membres (voir annexe), placés sous le commandement de l'Inspecteur général Om Prakash Rathor (Inde). La police civile continue de protéger les dossiers et les documents confidentiels aux centres de la Commission d'identification à Laayoune et à Tindouf. Les activités de formation, comme les réunions d'information organisées par le Bureau de liaison du HCR à Laayoune concernant l'aspect « protection du rapatriement librement consenti » et les instruments internationaux relatifs aux réfugiés, se sont poursuivies.

E. Préparatifs en vue du rapatriement des réfugiés sahraouis

13. Pendant la période considérée, le HCR a continué à assumer les responsabilités qui lui avaient été confiées à l'égard des réfugiés sahraouis dans les camps de Tindouf et à coordonner son action avec celle de la MINURSO. Une délégation de hauts fonctionnaires du HCR s'est rendue dans la région du 26 janvier au 2 février 2002 pour examiner avec le Maroc, le Front POLISARIO et l'Algérie, après avoir consulté la MINURSO, la question de l'adoption de mesures de confiance transfrontières en faveur des réfugiés sahraouis. Le Gouvernement marocain a assuré la délégation du HCR qu'il était en principe disposé à accepter les propositions faites par le Haut Commissariat, étant entendu que les modalités d'application seraient arrêtées ultérieurement. Le Front POLISARIO a réitéré sa position sur la nécessité d'intégrer ces activités dans le plan de règlement (S/21360 et S/22464 et Corr.1). Le Gouvernement algérien, tout en réitérant son adhésion au plan de règlement, a réaffirmé sa volonté de coopérer pleinement avec le HCR, en particulier pour l'application des mesures de confiance transfrontières envisagées, à condition que les réfugiés y consentent.

14. Le 26 janvier 2002, le HCR a mené des consultations avec le Gouvernement algérien, le Programme alimentaire mondial (PAM), l'Office d'aide humanitaire de la Commission européenne (ECHO) et ses partenaires opérationnels sur des questions d'intérêt commun relatives à l'exécution de son programme pour 2002. Les pénuries fréquentes de produits alimentaires de base subies par les réfugiés sahraouis, en raison d'un manque de moyens financiers, restaient un sujet de préoccupation majeure pour le Haut Commissariat. Afin de régler ce problème, le HCR avait organisé conjointement avec le PAM à Alger, le 29 janvier 2002, une réunion au cours de laquelle il avait lancé un appel de fonds qui devait permettre de recueillir une somme suffisante pour combler un déficit prévu de trois mois dans les approvisionnements alimentaires, en attendant l'arrivée des expéditions de vivres effectuées par le PAM. Une mission d'évaluation des besoins alimentaires coparrainée par le PAM et le HCR, et qui était accompagnée de représentants du Gouvernement hôte et des pays donateurs, s'est rendue dans les camps de Tindouf du 1er au 7 février 2002. Du 22 au 26 janvier 2002, le HCR avait organisé une autre mission d'enquête pour surveiller la situation des réfugiés sahraouis dans le nord de la Mauritanie.

15. Les pénuries alimentaires que connaissent les réfugiés sahraouis dans les camps de Tindouf constituent également une source de grave préoccupation. J'engage encore une fois la communauté internationale à apporter généreusement un appui au HCR et au PAM en vue de les aider à faire face à la détérioration de la situation alimentaire des réfugiés. Je lance également un vibrant appel au Maroc et au Front POLISARIO pour qu'ils acceptent sans délai de collaborer pleinement avec le HCR à l'application des mesures de confiance trop longtemps différées, comme le demandait déjà le Conseil de sécurité dans sa résolution 1238 (1999) et dans ses résolutions ultérieures.

F. Prisonniers de guerre, personnes portées disparues et détenues

16. Le Conseil se souviendra que, le 2 janvier, le Front POLISARIO avait annoncé la libération de 115 prisonniers de guerre marocains sur les 1 477 qu'il détenait. Ces prisonniers de guerre ont été rapatriés sous les auspices du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) le 17 janvier. Cette mesure, de même que les efforts déployés par le Maroc pour retrouver la trace de certains ex-combattants du Front POLISARIO portés disparus et l'amnistie qu'il a accordée en novembre 2001 à 25 détenus sahraouis, constituent un pas dans la bonne direction. S'ils se poursuivent et s'accélèrent, ces gestes contribueront à amener les parties à enfin résoudre ces questions humanitaires pressantes.

17. Cela étant, j'ai demandé à mon Représentant spécial de maintenir un contact étroit et régulier avec toutes les parties et de continuer à apporter une assistance au CICR et au HCR dans la réalisation de leurs activités humanitaires essentielles. À cet égard, je rappelle au Conseil qu'à ce jour, quelque 1 362 prisonniers de guerre marocains sont toujours détenus dans le cadre du conflit du Sahara occidental, la plupart depuis plus de 20 ans. Plus de 10 ans après l'entrée en vigueur du cessez-le-feu, leur libération aurait déjà dû intervenir, tant au titre du droit international humanitaire que des engagements pris par les parties à cette fin. J'espère que les membres du Conseil se joindront encore une fois à moi pour demander au Front POLISARIO de libérer sans délai tous les prisonniers de guerre encore détenus. J'espère également que les deux parties continueront de coopérer avec le CICR dans ses efforts visant à résoudre le problème des personnes portées disparues depuis le début du conflit.

G. Organisation de l'unité africaine

18. La délégation d'observation de l'Organisation de l'unité africaine (OUA) auprès de la MINURSO, conduite par le représentant principal de l'Organisation, l'Ambassadeur Yilma Tadesse (Éthiopie), continue d'apporter une aide et une coopération précieuses à la Mission. Je tiens à réitérer mes sincères remerciements pour cette contribution.

IV. Autres faits nouveaux

19. Le 29 janvier 2002, le Conseiller juridique a répondu à une lettre que le Président du Conseil de sécurité lui avait adressée le 13 novembre 2001, dans laquelle il lui demandait, au nom des membres du Conseil, son avis sur la légalité de contrats de prospection au large du Sahara occidental qu'aurait passés le Maroc avec des sociétés pétrolières étrangères (S/2002/161 et Corr.1). Dans une lettre qu'il m'a adressée le 1er février 2002, le Représentant permanent de l'Algérie a exprimé son point de vue sur cette question (S/2002/144). Le représentant du Front POLISARIO à New York a envoyé deux lettres sur le même sujet au Président du Conseil de sécurité, les 7 et 18 février, et le Représentant permanent du Maroc a exprimé son point de vue dans sa lettre datée du 8 février, adressée au Président du Conseil (S/2002/153), respectivement.

20. Le 24 décembre 2001, des détenus sahraouis ont entamé une grève de la faim de trois semaines dans la prison de Laayoune. À la suite d'une série de mesures prises par les autorités marocaines en vue de réduire la surpopulation dans les prisons, prévoyant notamment le transfert de détenus vers d'autres établissements pénitentiaires, cette grève a été interrompue. Certains détenus sahraouis ont repris leur grève de la faim le 24 janvier mais l'ont de nouveau suspendue deux jours plus tard.

V. Aspects financiers

21. Par sa résolution 55/262 du 14 juin 2001, l'Assemblée générale a ouvert, aux fins du fonctionnement de la Mission du 1er juillet 2001 au 30 juin 2002, un crédit d'un montant de 48,8 millions de dollars, à raison d'un montant d'environ 4,1 millions de dollars par mois. Compte tenu de la réduction du personnel de la Commission d'identification et d'autres mesures d'économie, je continuerai à réévaluer les besoins de la Mission et je soumettrai à l'Assemblée générale les ajustements qui en découlent, si nécessaire.

22. Au 31 janvier 2002, le montant des contributions non acquittées au compte spécial de la MINURSO s'élevait à 60 973 533 dollars et le montant total des contributions non acquittées pour l'ensemble des opérations de maintien de la paix à 2 165 678 953 dollars.

VI. Évaluation des progrès réalisés depuis la nomination de mon Envoyé personnel et des problèmes qui subsistent

23. Dans mon rapport au Conseil de sécurité daté du 20 juin 2001 (S/2001/613), j'ai retracé les difficultés que l'ONU avait rencontrées au cours des 10 dernières années dans ses efforts pour mettre en oeuvre le plan de règlement et qui avaient entraîné, à plusieurs reprises, des interruptions dans le processus d'identification. Après un blocage particulièrement long, durant la période allant de la fin de 1995 au début de 1997, j'ai nommé M. James A. Baker III Envoyé personnel du Secrétaire général dès mon entrée en fonctions en mars 1997, et je lui ai demandé de réévaluer l'applicabilité du plan de règlement. À la suite d'une tournée dans la région, au cours de laquelle il a rencontré les dirigeants des deux parties et des pays voisins, M. Baker m'a informé que, malgré les difficultés rencontrées et les retards enregistrés dans le processus, aucune des parties ne s'était montrée disposée à rechercher une solution politique en dehors de l'application du plan de règlement.

24. De l'avis de mon Envoyé personnel, le seul moyen réaliste d'évaluer l'applicabilité du plan consistait à organiser des pourparlers directs entre les parties. Il était toutefois conscient que les efforts déployés par l'ONU à cette fin au cours des années antérieures n'avaient pas abouti, essentiellement parce que le Gouvernement marocain était hostile à une rencontre face-à-face avec le Front POLISARIO.

25. Lorsque les parties se sont rencontrées sans intermédiaire à Lisbonne le 23 juin 1997, c'était la première fois depuis de nombreuses années qu'elles tenaient des pourparlers directs sur des questions de fond. Cette réunion n'a duré qu'une seule journée car on a constaté que les deux parties éprouvaient des difficultés à accepter la proposition présentée par mon Envoyé personnel pour concilier les points de vue sur la reprise du processus d'identification et que l'une et l'autre devaient consulter leurs mandants avant de donner une réponse. Cette situation s'est reproduite lors des trois autres séries de pourparlers directs qui ont eu lieu successivement en 1997. La durée de ces entretiens n'a jamais dépassé un jour et demi du fait que les parties manifestaient une grande réticence à l'égard des propositions qui visaient à aplanir leurs divergences de vues sur les questions litigieuses faisant obstacle à la mise en oeuvre du plan de règlement. Elles devaient interrompre les pourparlers et consulter leurs mandants avant de revenir à la table des négociations avec des demandes de modifications. Néanmoins, grâce au zèle et à la persévérance dont mon Envoyé personnel et ses collaborateurs ont fait preuve, un consensus a été réalisé sur toutes les questions litigieuses et, au cours de la dernière série d'entretiens qui a eu lieu à Houston (Texas) du 14 au 16 septembre 1997, les accords prévoyant la reprise du processus d'identification et, partant, de la mise en oeuvre du plan de règlement, sont entrés en vigueur (accords de Houston).

26. Aux paragraphes 27 à 29 de mon rapport daté de juin 2001 (S/2001/613), je décrivais les difficultés rencontrées dans la conduite et l'achèvement du processus d'identification et j'énumérais les principaux problèmes qui restaient à régler après la conclusion des accords de Houston. Ainsi qu'il est indiqué dans ce rapport, au moment de l'achèvement du processus d'identification à la fin de 1999, la MINURSO devait examiner 131 038 recours au total et, selon toute probabilité, les procédures de recours seraient encore plus lentes, plus pesantes et plus controversées que le processus d'identification lui-même.

27. Compte tenu de ces faits nouveaux, j'ai demandé à mon Envoyé personnel, au début de 2000, d'engager de nouvelles consultations avec les parties et les pays voisins. Après avoir effectué une visite dans la région du 8 au 11 avril, au cours de laquelle il a établi des contacts préliminaires avec tous les intéressés, mon Envoyé personnel m'a fait savoir qu'il lui fallait organiser une autre rencontre face-à-face entre les parties pour examiner les problèmes liés à l'application du plan de règlement (S/21360 et S/22464 et Corr.1) et des accords de Houston (S/1997/742, annexes I à III), ainsi qu'étudier d'autres formules possibles.

28. La première des trois réunions ainsi organisées en 2000 a eu lieu à Londres le 14 mai. Les pays voisins, l'Algérie et la Mauritanie, y ont également participé. Cette réunion n'a pas permis de résoudre les problèmes séparant les parties. Finalement, mon Envoyé personnel a invité les parties à proposer lors de la prochaine réunion des solutions concrètes aux problèmes multiples du plan de règlement sur lesquelles elles pourraient s'entendre l'une et l'autre ou encore à être disposées à examiner d'autres moyens de parvenir à un règlement rapide, durable et concerté de leur différend au sujet du Sahara occidental.

29. Au cours de la deuxième réunion, tenue à Londres le 28 juin 2000, chaque partie a défini des domaines, concernant essentiellement la procédure de recours et le rapatriement des réfugiés, qui à leurs yeux soulevaient des difficultés concernant l'application du plan. Toutefois, aucune des parties n'a présenté de propositions précises visant à résoudre les multiples problèmes du plan de règlement sur lesquelles les deux parties puissent s'entendre. En outre, mon Envoyé personnel a indiqué qu'à son avis, d'autres questions étaient toujours sans solution, comme par exemple la mise en application des résultats du référendum, la libération des prisonniers de guerre et des détenus politiques sahraouis et les problèmes éventuels liés à l'application du code de conduite relatif à la campagne référendaire.

30. Mon Envoyé personnel s'est aussi inquiété de ce que les parties ne soient pas encore parvenues à négocier ces problèmes à cause de la vive animosité existant entre elles. À son avis, aucune des deux parties ne s'était montrée disposée à se défaire d'une mentalité selon laquelle le gagnant emporte tout ni à examiner des solutions politiques possibles offrant à chacune d'elles une partie, mais pas la totalité, de ce qu'elle veut, et permettant à l'autre partie de faire de même. Après avoir demandé à nouveau aux parties, sans succès, de formuler des propositions concrètes permettant de concilier leurs divergences, mon Envoyé personnel a estimé qu'au lieu de résoudre les problèmes, la réunion avait en fait provoqué un retour en arrière, étant donné qu'elle avait eu pour effet de creuser le fossé séparant les parties.

31. Il n'en a pas moins estimé qu'une solution politique ne serait possible que grâce à un dialogue direct entre les parties, et il a demandé à celles-ci de se réunir de nouveau afin de tenter de parvenir à une solution politique. Il a été rappelé aux parties qu'au cas où elles accepteraient d'examiner une solution politique autre que le plan de règlement, elles ne compromettraient en rien leur position finale, étant donné que, d'après le règlement des consultations, rien n'est conclu tant que tout n'est pas conclu.

32. La troisième réunion organisée entre les parties sous les auspices de mon Envoyé personnel a eu lieu à Berlin le 28 septembre 2000. Au cours de l'examen de l'état du plan de règlement, les deux parties ont réaffirmé leurs positions divergentes; elles ont toutefois l'une et l'autre donné l'assurance de leur coopération avec les Nations Unies. Mon Envoyé personnel a fait observer aux parties qu'il entendait les mêmes arguments et les mêmes promesses de coopération depuis 1997 et s'est montré sceptique quant à la validité de ces engagements.

33. Il a rappelé que, dès le début de la réunion, il avait demandé aux parties si elles avaient dégagé de nouvelles positions sur l'une ou l'autre question. Il a eu le sentiment qu'il n'y avait aucune volonté politique, ni d'un côté ni de l'autre, de progresser. Il a rappelé que de nombreuses voies pouvaient mener à l'autodétermination. Celle-ci pouvait être réalisée par la guerre ou la révolution; elle pouvait être réalisée par des élections, ce qui nécessitait toutefois de la bonne volonté; ou encore, elle pouvait être réalisée par la voie d'accords, ce qu'avaient fait les parties à d'autres différends. Lorsque mon Envoyé personnel leur a demandé si elles seraient disposées à rechercher cette dernière voie sans abandonner le plan de règlement, les deux parties ont réaffirmé leur attachement au plan. Elles n'en ont pas moins fait part de divergences fondamentales et d'approches différentes quant à l'application correcte du plan.

34. Mon Envoyé personnel a alors proposé que les parties recherchent les moyens de faire progresser la procédure de recours, comme le souhaitait le Front POLISARIO, tout en recherchant une solution politique mutuellement acceptable, ainsi que le Conseil de sécurité l'avait demandé dans sa résolution 1309 (2000). La délégation marocaine a fait observer que la question des recours avait été examinée sous tous ses aspects et était épuisée. De l'avis du Maroc, la question était dans l'impasse, non à cause de points de détail, mais pour des raisons de principe.

35. Mon Envoyé personnel a ensuite demandé aux parties si, sans abandonner le plan de règlement, elles seraient disposées à rechercher une solution politique pouvant ou non être confirmée par un référendum ultérieur. Le Front POLISARIO a répondu qu'il n'était pas disposé à examiner quoi que ce soit en dehors du plan de règlement. De son côté, la délégation marocaine a indiqué qu'elle était disposée à engager un dialogue sincère et franc avec le Front POLISARIO, avec le concours de mon Envoyé personnel, afin d'élaborer une solution durable et définitive tenant compte de la souveraineté et de l'intégrité territoriale du Maroc, ainsi que des caractéristiques propres à la région, conformément aux principes démocratiques et aux principes de décentralisation que le Maroc tenait à développer et appliquer, en commençant par la région du Sahara.

36. Le Front POLISARIO a rejeté la proposition du Maroc et rappelé qu'il coopérerait et adhérerait à tout dialogue s'inscrivant dans le cadre du plan de règlement.

37. À l'issue de ces consultations, mon Envoyé personnel a estimé, et je partage cet avis, que toute nouvelle réunion des parties visant à la recherche d'un règlement politique était vouée à l'échec et pourrait même se révéler contre-productive, à moins que le Gouvernement marocain, en tant que puissance administrative au Sahara occidental, ne soit disposé à offrir ou appuyer une certaine dévolution du pouvoir gouvernemental, à tous les habitants et anciens habitants du territoire, qui soit authentique, tangible et conforme aux normes internationales.

38. C'est près de six mois plus tard, au printemps de 2001, que mon Envoyé personnel a pu déterminer que le Maroc, en tant que puissance administrative au Sahara occidental, était disposé à appuyer un projet d'accord-cadre (S/2001/613, annexe I) sur le statut du Sahara occidental qui prévoyait la dévolution du pouvoir aux habitants du territoire, son statut définitif devant être fixé par voie de référendum cinq ans plus tard. Après avoir établi que le Gouvernement marocain était disposé à appuyer le projet d'accord-cadre, mon Envoyé personnel l'a présenté au Gouvernement algérien et au Front POLISARIO. Le Conseil de sécurité a eu l'occasion de prendre connaissance des vues du Gouvernement algérien et du Front POLISARIO, qui étaient annexées à mon rapport de juin (S/2001/613, annexes II et IV).

39. Étant donné les nettes réserves exprimées par le Gouvernement algérien et le refus du Front POLISARIO d'envisager le projet d'accord-cadre, le Conseil de sécurité, dans sa résolution 1359 (2001) du 29 juin 2001, a appuyé ma proposition tendant à inviter toutes les parties à se rencontrer face-à-face ou dans des pourparlers indirects, sous les auspices de mon Envoyé personnel, afin d'examiner l'accord-cadre et de négocier toutes modifications qu'elles souhaiteraient expressément y voir figurer. Le Conseil a également encouragé les parties à examiner toute autre proposition de règlement politique qui pourrait être avancée par les parties, pour parvenir à un accord mutuellement acceptable. Le Conseil a affirmé dans sa résolution que, pendant que ces pourparlers se poursuivraient, les propositions officielles soumises par le Front POLISARIO dans le but de surmonter les obstacles à l'application du plan de règlement seraient examinées.

40. Après l'adoption de la résolution 1359 (2001), mon Envoyé personnel a rencontré en août 2001, à Pinedale dans le Wyoming, des représentants de haut niveau du Front POLISARIO et du Gouvernement algérien et de la Mauritanie. Ni le Gouvernement algérien ni le Front POLISARIO n'étaient disposés à entamer une discussion approfondie du projet d'accordcadre, malgré les signes de souplesse manifestés par le Gouvernement marocain dont mon Envoyé personnel leur avait fait part. Compte tenu des réponses que mon Envoyé personnel a reçues du Gouvernement algérien et du Front POLISARIO, qui ont rejeté le projet d'accord-cadre (S/2002/41, annexes I et II), il ne voit guère comment les parties pourraient accepter finalement de leur plein gré cette formule pour régler leur différend au sujet du Sahara occidental. Il estime également, avis que je partage, que la proposition présentée par l'Algérie au lieu du projet d'accordcadre, tendant à ce que l'Organisation des Nations Unies assume la souveraineté sur le Sahara occidental afin d'appliquer les dispositions qui semblent identiques à celles du plan de règlement, n'a pas plus de chance que le plan de règlement de déboucher sur un règlement rapide, durable et concerté du conflit au sujet du Sahara occidental.

41. Par la suite, comme indiqué au paragraphe 2 cidessus, mon Envoyé personnel a rencontré le Président Bouteflika et des hauts fonctionnaires du Gouvernement algérien à l'Institut James Baker à Houston (Texas) le 2 novembre 2001 et, à deux reprises, le Roi Mohammed VI et d'autres hauts fonctionnaires du Gouvernement marocain au Maroc, les 24 et 25 janvier 2002.

42. À ma demande, mon Envoyé personnel a accepté, il y a près de cinq ans, de tenter d'aider à trouver une solution au différend sur le Sahara occidental. Comme le présent rapport et mes rapports précédents au Conseil de sécurité le montrent, il s'y est employé inlassablement tout au long de cette période. Il m'a récemment réaffirmé qu'il était déçu par l'absence de progrès faits vers le règlement du problème du Sahara occidental &endash; règlement qui fait cruellement défaut pour l'instauration de la paix, de la stabilité et de la prospérité sur le long terme dans la région du Maghreb.

VII.Observations et recommandations

43. Bien qu'elles affirment le contraire, les parties n'ont pas montré qu'elles étaient disposées à coopérer pleinement avec l'Organisation des Nations Unies, que ce soit pour appliquer le plan de règlement ou essayer de négocier une solution politique qui déboucherait sur un règlement rapide, durable et concerté de leur différend sur le Sahara occidental.

44. Comme indiqué dans mon rapport du 2 juin 2001 (S/2001/613, par. 52), mon Envoyé personnel considère, en s'appuyant sur l'évaluation des travaux, que l'Organisation des Nations Unies a menés au cours des 10 années précédentes en vue d'appliquer le plan de règlement, notamment durant la période au cours de laquelle il a été partie prenante, qui a duré près de cinq ans, qu'il est fort peu probable que le plan de règlement puisse être appliqué dans sa forme actuelle d'une manière qui permette de parvenir à un règlement rapide, durable et concerté du différend concernant le Sahara occidental.

45. Mon Envoyé personnel considère que malgré les indications selon lesquelles le Maroc montrerait une disposition à négocier, il ne sert à rien à l'heure actuelle de discuter (si ce n'est comme prévu au paragraphe 49 ci-dessous) le projet d'accord-cadre car ni le Gouvernement algérien ni le Front POLISARIO ne se montre disposé à participer à une discussion de celui-ci.

46. Mon Envoyé spécial considère aussi que malgré les indications selon lesquelles l'Algérie et le Front POLISARIO seraient disposés à négocier une division éventuelle du territoire, il ne sert à rien d'engager à l'heure actuelle une discussion de ce type, si ce n'est comme prévu au paragraphe 50 ci-dessous, étant donné que le Gouvernement marocain ne souhaite pas discuter une telle approche, même s'il est parvenu à un accord similaire avec le Gouvernement mauritanien en 1976. Je fais miennes les vues de mon Envoyé spécial telles qu'exprimées aux paragraphes 44 et 45 et dans le présent paragraphe.

47. À l'heure actuelle, les perspectives sont plutôt sombres concernant le processus de paix au Sahara occidental. Mon Envoyé personnel et moi-même considérons qu'il existe quatre options que le Conseil de sécurité devrait étudier en tenant compte de l'évaluation susmentionnée, qui est pessimiste mais réaliste.

48. Selon la première option, l'Organisation des Nations Unies pourrait une fois de plus recommencer à tenter d'appliquer le plan de règlement, mais sans exiger l'assentiment des deux parties avant qu'une décision ne puisse être prise. Cette initiative commencerait par la procédure de recours mais, même en suivant une approche non consensuelle comme celle-ci, l'Organisation des Nations Unies se heurterait au cours des prochaines années à la plupart des problèmes et obstacles qu'elle a rencontrés durant les 10 dernières années. Le Maroc ne s'est pas montré disposé à aller de l'avant avec le plan de règlement; l'Organisation des Nations Unies pourrait ne pas être en mesure d'organiser un référendum libre et régulier dont les résultats seraient acceptés par les deux parties; et il n'y aurait toujours pas de mécanisme pour faire appliquer les résultats du référendum. Dans le cadre de cette option, la Commission d'identification de la MINURSO serait renforcée et de fait, la taille globale de l'opération serait accrue.

49. Selon la deuxième option, mon Envoyé spécial pourrait entreprendre de réviser le projet d'accordcadre en prenant en considération les préoccupations exprimées par les parties et par d'autres entités ayant l'expérience de ce type de documents. Toutefois, dans une telle éventualité, mon Envoyé spécial ne rechercherait pas l'assentiment des parties comme cela a été fait par le passé s'agissant du plan de règlement et du projet d'accord-cadre. L'accord-cadre révisé serait soumis au Conseil de sécurité, qui le présenterait ensuite aux parties comme étant non négociable. Dans le cas où le Conseil retiendrait cette option, les effectifs de la MINURSO pourraient être à nouveau réduits.

50. Selon la troisième option, le Conseil de sécurité pourrait demander à mon Envoyé personnel d'examiner une dernière fois avec les parties si oui ou non elles seraient disposées à envisager sous ses auspices, directement ou dans le cadre de pourparlers indirects, la possibilité de diviser le territoire, étant entendu que rien ne serait décidé jusqu'à ce que tout ait été réglé. Dans le cas où le Conseil de sécurité retiendrait cette option et dans l'éventualité où les parties ne seraient pas disposées à accepter une division du territoire avant le 1er novembre 2002, ou en mesure de le faire, il serait également demandé à mon Envoyé personnel de soumettre aux parties une proposition de division du territoire dont le Conseil de sécurité serait également saisi. Celui-ci présenterait cette proposition aux parties comme étant non négociable. Cette tentative de solution politique aurait le mérite de donner partiellement, sinon entièrement, satisfaction à chaque partie et s'inspirerait des accords territoriaux précédents &endash; aux termes desquels le Maroc et la Mauritanie sont convenus en 1976 d'une division du territoire &endash; sans pour autant les reproduire. Dans le cas où le Conseil de sécurité retiendrait cette option, la MINURSO pourrait maintenir ses effectifs actuels ou les réduire encore davantage.

51. Selon la quatrième option, le Conseil de sécurité pourrait décider de mettre fin aux activités de la MINURSO, ce qui reviendrait à reconnaître qu'après avoir tenté de le faire pendant plus de 11 ans en dispensant près de 500 millions de dollars, l'ONU ne pourra résoudre le problème du Sahara occidental si elle n'exige pas que l'une ou l'autre des parties, ou les deux, fassent des concessions qu'elles se refusent actuellement à faire.

52. Il ne m'échappe pas qu'aucune des options susmentionnées ne semblera parfaite aux parties et pays intéressés. Afin de donner au Conseil de sécurité le temps de mûrir sa décision, je recommande de proroger le mandat de la MINURSO de deux mois, jusqu'au 30 avril 2002.

Annexe

Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental : contributions au 7 février 2002


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