L'AUTODETERMINATION DU SAHARA OCCIDENTAL
1974 - 2004
ANALYSES - REFLEXIONS - TEMOIGNAGES
 

Le peuple sahraoui, trois décennies de survie

par Hamdi Salek Allal

 

Introduction

Tout d’abord j’aimerais avertir le lecteur que, quand je me réfère à nous dans ce papier, je fais allusion à un sentiment général qui existe parmi notre population.

Tout le monde est en train d’attendre la réponse marocaine au dernier plan des Nations Unies, dit plan Baker II, adopté par le Conseil de Sécurité le 31 Juillet 2003. Ce plan prévoit notamment la célébration d’un référendum d’autodétermination au Sahara Occidental après une période transitoire de cinq ans. Le peuple sahraoui aura à choisir entre trois options: une autonomie large, l’intégration dans le royaume du Maroc ou l’indépendance du territoire. Le Maroc l’avait refusé parce qu’il comporte la possibilité de l’indépendance. Il doit donner sa réponse avant la fin du mandat de la Minurso qui expire le 31 Octobre 2004. [la réponse sous forme d'un mémorandum a été rendue publique le 27.09.04] C’est une faveur que le Conseil de Sécurité lui a accordé avant de prendre une position qui pourrait être plus ferme à son égard. M. James Baker a déclaré, après sa démission de son poste en tant qu’Envoyé personnel du Secrétaire général des Nations Unies chargé du dossier du Sahara Occidental, dans une interview á la chaîne de télévision américaine PBS que le Maroc est la partie principale qui entrave toutes les démarches des Nations Unies au Sahara Occidental. Il semble que l’intransigeance du Maroc est irréductible. Il n‘a pas fait jusqu’à présent des concessions substantielles afin de manifester sa volonté pour résoudre le problème. Mais est-ce que sa position est une position de force ou de faiblesse? Elle est de force s’il a réussi à vaincre son ennemi le peuple sahraoui sous la direction du Front Polisario et de faiblesse si ce dernier a pu non seulement survivre mais aussi s’imposer et gagner sa bataille. Le défi du peuple sahraoui. Recommençons l’histoire de sa lutte, tout, dès le début.

Le partage du Sahara Occidental ou to be or nor to be

L’été de 1975 était un des plus chauds que notre région avait connu, non pas à cause des hautes températures et des vents chauds qui caractérisent cette zone mais surtout politiquement. Une mission d’enquête des Nations Unies avait visité le Sahara Occidental et les pays voisins le mois de mai pour s’informer sur place des positions de la population autochtone et des pays concernés. Le Front Polisario avait provoqué une grande surprise dans tout le territoire. Ce mouvement qui était jusqu’alors clandestin et réprimé par l’administration coloniale, était apparu en présence de la mission des Nations Unies lors de sa visite, comme le principal mouvement politique jouissant du soutien de toute la population et de la diaspora sahraouie dans les pays voisins. C’était la plus grande victoire que le Front Polisario ait remporté deux années seulement après sa création et qui lui a permis d’être reconnu par les Nations Unies comme la force politique dominante au Sahara Occidental.

Mais en même temps la sagesse des nomades du Sahara Occidental leur indiquait que l’indépendance de leur pays ne sera pas une chose facile devant les revendications marocaines et mauritaniennes. Une discussion ouverte s’était instaurée dans tout le territoire entre les militants du Front Polisario et la population pour décider de ce qu’il faut faire dans le pire des cas c’est-à-dire la livraison du Sahara Occidental au Maroc. Tout le monde était unanime. "Nous poursuivrons la lutte armée contre les nouveaux envahisseurs. Le Maroc n’est pas plus fort que l’Espagne et nous le vaincrons rapidement".

La campagne de sensibilisation n’a que trop peu duré. La Cour Internationale de Justice de La Haye a rendu son verdict consultatif sur la question du Sahara Occidental le 16 Octobre 1975. La Cour a passé, à la demande du Maroc plus d’une année à la recherche de réponses à deux questions qui lui ont été posées par l’Assemblé générale des Nations Unies:

  1. est-ce que le Sahara Occidental était une terra nullius avant la colonisation espagnole?

    Et si la réponse est négative,

  2. quelle est la nature des relations qui existaient entre lui et le Maroc et la Mauritanie?

Comme le verdict a établi que ces deux pays n’avaient jamais exercé des droits de souveraineté sur le territoire, donc un avis défavorable à leurs attentes, le roi Hassan II annonça l’organisation de "la marche verte" pour exercer des pressions contre le gouvernement espagnol. Franco était à l'agonie.

La marche verte

Le roi Hassan II dans un discours imprévu, le 16 Octobre 1975, après avoir eu connaissance du verdict de la Cour Internationale de Justice qui avait été rendu public le même jour, ordonna l’organisation d’une marche de 350'000 personnes vers le Sahara. Cette initiative a pris une couverture médiatique internationale exceptionnelle pour des raisons diverses dont les plus importantes sont:

  1. c’est la première fois dans l’histoire contemporaine qu’une marche si grande est organisée,
  2. parce que la marche se dirigeait vers un autre pays dont l’armée se disait prête à repousser n’importe quelle atteinte à sa souveraineté. La confrontation militaire entre les deux pays était inévitable.

Mais si le monde avait interprèté la marche de cette façon-là, le roi avait d’autres intentions. Certes le Maroc était insatisfait de ses frontières, pour cela il avait revendiqué le Sahara Occidental, la Mauritanie et une partie de l’Algérie comme étant ses propres terres. La Mauritanie a eu son indépendance et il l’a reconnue comme état souverain, il a échoué dans sa guerre contre l’Algérie et il ne lui restait que le Sahara Occidental. Mais le plus important de tout cela c’est que ces revendications n’avaient pas de base ou d’appui populaire ni d’unanimité dans la classe politique qui était plus préoccupée par la situation créée après les deux tentatives de coup d’état. Alors la magique "marche verte " a résolu tous les problèmes politiques du pays à la fois:

L’Espagne céda et signa les accords de Madrid le 14 Novembre 1975 pour le partage du Sahara Occidental entre le Maroc et la Mauritanie. Ces accords stipulaient entre autre:

Comme accord international entre trois pays, ces accords n’ont jamais été ratifiés par les parlements des pays signataires. Ils n’ont pas non plus été publiés dans le bulletin officiel de l’état espagnol.

La réaction du peuple sahraoui

L’audience qu’a eu le Front Polisario durant la visite de la mission d’enquête des Nations Unies au mois de Mai 1975 lui a permis d’être reconnu officiellement par les autorités espagnoles, surtout après la libération des prisonniers militaires espagnols au mois de Juillet 1975. Ainsi il a pu mener une campagne de sensibilisation très intense au Sahara Occidental et partout où se trouvaient des Sahraouis particulièrement dans les pays voisins et en Europe.

La décision du roi d’organiser la marche verte vers le territoire a constitué la sonnette d’alarme pour tous les Sahraouis. D’une part tout le monde a eu la certitude que le Maroc va envahir le territoire. Les forces armées marocaines se regroupaient déjà au sud-est du Maroc. Tous ceux qui étaient militants du Front Polisario ont regagné les rangs des combattants dans la zone nord qui a été évacuée à la fin de l’été par l’Espagne. Les populations civiles les avaient suivies.

Les semaines qui suivirent l’annonce de la marche verte sont passées très rapidement: la marche verte s’organisait pour traverser la frontière, le début de la guerre entre les combattants du Front Polisario et les forces armées marocaines au nord-est du Sahara et au nord de Smara et la signature des accords tripartites de Madrid le 14 Novembre 1975.

Tout le monde était unanime. La mort dans le désert vaut mieux que la mort sous l’occupation marocaine et mauritanienne.

Le Front Polisario était contre la sortie des populations vers les territoires qu’il contrôlait mais il n’avait pas non plus des moyens pour les priver de le faire.

Les bombardements des camps de réfugiés par l’aviation marocaine à Oum Dreigua, Guelta et Tifariti avaient montré à notre peuple ce que lui réservaient les nouveaux colonisateurs: l’extermination.

L’unité des Sahraouis, leurs sacrifices et leur endurance leur ont permis de relever un défi historique: le choix entre la soumission et la disparition en tant que peuple ou la lutte, tout en étant en position de faiblesse, pour leurs droits confisqués par deux pays voisins jouissant de l’appui des Etats-Unis et de la France. Ils avaient choisi le plus difficile: la lutte pour l’existence.

Le Front Polisario qui avait entamé la guerre contre les nouveaux envahisseurs, rejetta les accords tripartites de Madrid et déclara le 27 Février 1976 la naissance de la République Arabe Sahraouie Démocratique comme Etat indépendant devant combler le vide politique légal après la fin de l’administration espagnole le 26 Février. La bataille diplomatique pour l’admission de cette république au sein de l’Organisation de l'Unité Africaine a été aussi difficile que la bataille militaire. Elle fut admise dans cette organisation africaine en 1984. Une résolution de cette organisation constitua ultérieurement la base du plan conjoint ONU - OUA pour le règlement du conflit.

La position de l"Algérie

L’Algérie pays frontalier du Sahara Occidental n’a pas été informée officiellement ni consultée par l’Espagne, le Maroc et la Mauritanie avant la signature des accords tripartites de Madrid. Chose qui ne devait pas se produire, ne serait-ce que par courtoisie diplomatique entre quatre états voisins qui se partagent beaucoup d’intérêts en commun.

La position algérienne doit être étudiée en fonction des intérêts des différents acteurs impliqués, dès le début du problème, d’une manière ou d'une autre, dans ce conflit et qui sont: le régime marocain, les amis du Maroc: les pays occidentaux et les pays arabes du Moyen Orient, le peuple sahraoui, l’Algérie et enfin l’Espagne.

Il me serait très difficile d’aborder les causes motivant les positions de toutes les parties impliquées dans ce problème, néanmoins je voudrais faire ressortir certains faits historiques qui ont formé la base de la politique algérienne vis-à-vis de la question du Sahara Occidental.

L’argumentation marocaine se base sur les justifications suivantes:

Pour l’Algérie ces arguments sont complètement faux et constituent une mystification de la réalité des choses et des causes du conflit.

Le régime marocain a basé toute sa revendication sur le Sahara Occidental sur des prétendues relations d’allégeance entre les tribus sahraouies et les sultans du Maroc. Ces relations n’ont jamais existé pour les raisons suivantes:

  1. le Sahara Occidental est séparé du Maroc par une barrière naturelle, l'Oued Draa et les monts Ouarkziz qui entravent la circulation et le mouvement entre le nord et le sud, deux passages seulement, un au niveau de Tan Tan et le deuxième est Touizgui au nord de Zak,
  2. les sultans du Maroc étaient tous faibles et leur pouvoir ne dépassait pas les contours de leurs capitales. Le reste est le bled siba : le pays où règnait l’anarchie.
  3. L’allégeance dans l’islam est une expression d’obéissance et de soumission des faibles aux forts et des vaincus aux vainqueurs que ce soit pour des raisons religieuses ou de recherche de protection. Les tribus sahraouies ne nécessitaient ni aide ni protection de ces sultans qui se trouvaient à plus de mille km du Sahara, dans le meilleur des cas à plus de vingt jours de voyage dans un sens à dos de chameau!!!

Le Maroc a interprété le dictamen de la Cour Internationale de Justice à sa guise induisant son peuple en erreur. Il a basé sa revendication sur une interprétation et non sur un jugement clair, pour cela la communauté internationale a toujours refusé sa position. C’est la base de la bataille juridique sur ce territoire que le Maroc a perdu dès le début du conflit et qui constitue la force de l’argument algérien dans son soutien au peuple sahraoui.

Certes l’Algérie aura un jour besoin d’une sortie vers l’Atlantique pour l’exportation du fer de Tindouf ou d’autres minerais, mais est ce qu’elle a besoin pour ce faire de créer un état? Est-ce qu'elle ne peut pas le faire à travers le Maroc? Les côtes marocaines sont plus proches de Tindouf que les sahraouies. Un gazoduc algérien est déjà en place et traverse le nord du Maroc. La question qui se pose: est-ce que le Maroc n’accuse pas l’Algérie de ce qu’il garde lui-même pour ses voisins: avoir un pont vers l’Afrique subsaharienne? Le fleuve Sénégal n’est-il pas la frontière de l’empire marocain ? S’il a des frontières!!!

La monarchie et sa presse accusent l’Algérie d’avoir créé le Front Polisario comme un instrument de son hégémonie dans la région et pour contrecarrer l’expansion du Maroc vers le sud. C’est un point que je ne vais pas aborder pour question d’espace. Je tiens simplement à rappeler en plus de la position officielle algérienne certains faits:

Comme nous venons de le voir la position algérienne puise sa force tout d’abord de la faiblesse juridique des revendications marocaines. Mais elle émane aussi d’une considération humanitaire. L’Algérie a été un témoin vivant du génocide dont a été victime le peuple sahraoui en 1975. Pourrait-elle commettre le même crime contre lui alors qu’il s’était réfugié dans son territoire?

La bataille militaire

Effectivement notre pays a été divisé et notre peuple partagé comme un troupeau de chameaux. Un précèdent dans l’histoire de l’humanité. Un mépris et une sous-estimation jamais vus. Mais ce peuple de nomades avait décidé tous azimuts de lutter contre les armées marocaine et mauritanienne, et plus tard même française: trois armées en même temps. Une guerre s’était déclenchée dans toute la région englobant le sud marocain, le Sahara Occidental et toute la Mauritanie: le plus vaste théâtre d’opérations militaires depuis la seconde guerre mondiale!!!

Nous avions mené cette guerre avec un génie, un dévouement et un courage exceptionnels. Nous avions vaincu la Mauritanie militairement et obligé le Maroc à opter pour la tactique de construction des murs de défense. Le mur final a une longueur de 2400 km, de l’extrême sud-est du Maroc jusqu’à la frontière entre le Sahara Occidental et la Mauritanie à la hauteur de Nouadhibou. A la veille du cessez-le-feu plus de 140'000 soldats marocains étaient sur le mur de défense.

L’évolution militaire du conflit, qui a été continuellement positive et en faveur de l’armée sahraouie, a toujours créé un espoir de retour très rapide au pays natal,ayant en mémoire que toutes les familles avaient laissé de proches parents de l’autre côté du mur qui n’englobait qu’une petite partie du Sahara Occidental.

La deuxième moitié des années quatre-vingt a été plus décevante pour la majorité des Sahraouis, en premier lieu parce que l’armée marocaine a pu étendre son occupation militaire pour englober 80 pour cent du territoire. Le Maroc avait pu en effet construire les murs les uns après les autres, c’était un signe extérieur d’une force militaire invincible. Mais les Sahraouis qui connaissaient bien l’armée marocaine ont détruit progressivement l’efficacité militaire des murs grâce à une guerre d’usure qu’ils avaient improvisée et bien menée. Le Maroc a perdu la guerre à partir du moment où ses armées se sont retranchées derrière des murs de sable. Il a perdu l’initiative sur le terrain. Ainsi ce mur qui était conçu comme une tactique militaire a perdu sa valeur militaire, mais conservait sa valeur psychologique: l’occupation du territoire par la force.

Cependant le pessimisme dû à la construction des murs a été compensé par l’élaboration en parallèle du plan de réglement des Nations Unies pour l’organisation du référendum d’autodétermination au Sahara Occidental: une lueur d’espoir enfin.

La bataille diplomatique.

Dès le début de la guerre et l’exode, le Front Polisario a mené une campagne d’explication de la cause sahraouie au niveau international pour plusieurs raisons, dont notamment:

  • Mais les batailles diplomatiques les plus dures se sont produites au niveau de l’Organisation de l’Unité Africaine et des Nations Unies. Ces batailles que le Maroc a certainement perdu car la première organisation a reconnu et admis la République Arabe Sahraouie Démocratique en son sein, alors que les Nations Unies ont chaque année reitéré que le problème du Sahara Occidental est un conflit de décolonisation qui doit être résolu à travers un référendum d’autodétermination. Les Nations Unies sont présentes dans le territoire depuis 1991. Elles sont devenues l’acteur principal dans le conflit en plus des deux belligérants.

    Le Front Polisario, contrairement à tous les mouvements de libération, a toujours joui d’une compréhension de la part des gouvernements et des opinions publiques des pays occidentaux, car il est le seul mouvement qui n’a pas recouru au terrorisme durant les années de guerre, comme il n’a pas eu de liens avec les groupes terroristes. Ils sont pourtant très nombreux dans notre monde. La diplomatie sahraouie a échoué uniquement dans le monde arabe qui reste fermé devant les Sahraouis. Officiellement les Arabes disent qu’ils sont pour l’unité arabe, qu’ils oeuvrent pour cette unité et par conséquence qu'ils sont contre l’apparition d’un autre pays dans le monde arabe. La vérité c’est que tous les pays arabes sont gouvernés par des partis uniques ou des monarchies qui partagent avec le Maroc les mêmes données politiques: régimes anti-démocratiques, pluralisme formel et absence d’opinion publique.

  • La longue attente des Sahraouis

    L’exode des populations commença au mois d’octobre 1975 vers les territoires administrés par le Front Polisario. Ce dernier devait leur assurer des refuges sûrs et en même temps faire face à l’avancée des troupes marocaines et mauritaniennes. Une tâche auquel il n’était pas préparé.

    Le climat dans cette région est des plus difficiles dans le monde. C’est vrai que nous sommes des nomades, que nous, nos pères et leurs pères sont nés et ont tous grandi dans le désert ,mais cela ne constitue pas une justification pour nous condamner à supporter l’insupportable. Les étés sont chauds, les hivers très froids et les vents de sable très violents et parfois atteignent des vitesses très grandes. Ces variations de température affectent tout, les tentes, les maisons, les biens et les services mais surtout le moral. On se plaint contre tout y compris contre la nature elle-même. Mais malgré tout cela on patiente et on résiste. On survit.

    L’attente des Sahraouis, que se soit dans les campements de réfugiés ou dans les territoires occupés, allait se prolonger et aussi leur souffrance. Cette attente était très difficile durant les dix premières années de l’exil. Nous avions cru que notre retour au pays n'allait pas prendre tant d’années, pour cela nous n’avions pas fait des constructions dans les campements de réfugiés. C’est simplement à partir du milieu des années quatre-vingt que les familles avaient commencé à bâtir des cuisines et des chambres en dur faites de briques de sable.

    La dépendance alimentaire et sanitaire de la communauté internationale est un autre domaine d’attente. Tout vient de l’étranger. Tout doit traverser 2000km pour parvenir aux campements des réfugiés. Une longue route, très longue pour les camionneurs, mais aussi pour les réfugiés, de laquelle dépend leur salut.

    Les territoires occupés

    La division artificielle de notre pays exacerbe les souffrances de notre peuple. La fuite spontanée de nos populations devant l’avancée des armées marocaine et mauritanienne avait provoqué non seulement un exode de populations mais aussi une division sans précèdent des familles. Si les populations qui avaient fui l’invasion, ont été victimes de la famine, de la soif, des bombardements aériens de la part de l’aviation marocaine et toutes sortes de difficultés dues à l’exode, celles restées sous l’occupation n’avaient pas connu un meilleur sort. Dès leur arrivée dans les villes sahraouies, les armées d’occupation et leurs administrations ont mené des campagnes d’arrestations et d’enlèvements systématiques contre tous ceux qui étaient militants ou sympathisants du Front Polisario et aussi tous ceux qui avaient manifesté des positions contre le Maroc ou la Mauritanie. L’endurance de nos populations restées sous l’occupation était très difficile car elles ignoraient, dans une ambiance de terreur politique et de répression, le sort de leurs proches qui se trouvaient en exil. Les opérations militaires qui se multipliaient n’avaient fait qu’accroître cette tension des deux côtés, entre les envahisseurs et la population locale.

    Nombreux sont ceux qui croient que les 350'000 Marocains qui avaient participé à la marche verte sont restés dans le territoire. La marche n’avait pas dépassé 6 km dans le Sahara Occidental et tous ceux qui y avaient participé sont rentrés au Maroc. On peut dire, que dès la fin de 1975 jusqu’à 1985, le nombre de la population civile d’origine marocaine était très réduit et se constituait du personnel de l’administration, des officiers de l’armée et de quelques familles. A partir de la deuxième moitié des années quatre-vingt et la construction des premiers murs de défense, les autorités d’occupation avaient conçu une politique de déportation forcée des populations, surtout les jeunes, vers les différentes villes de l’intérieur du Maroc, sous prétexte de leur procurer du travail. Plus de 8'000 jeunes ont été touchés par ce programme. Mais simultanément le régime commença aussi à envoyer des Marocains au Sahara, étant donné que les villes sont protégées contre les attaques de l’armée sahraouie. Le régime marocain a donc pu vider le territoire de ses propres populations et l’a inondé de populations marocaines à partir du cessez-le-feu, ce qui est contraire aux clauses du plan de règlement. La Minurso n’a rien fait. Cette population marocaine se compose essentiellement d’hommes venus chercher du travail. Ils vivent dans des conditions misérables qu’ils acceptent pourvu qu’ils épargnent de l’argent qu’ils envoient á leurs familles. Les colons marocains ne sont en réalité qu’une armée de chômeurs venus à la recherche du travail. Le nombre de la population civile et l’armée marocaine dans les territoires occupés dépasse aujourd’hui de loin celui de la population autochtone.

    Les territoires occupés ont depuis le début été considérés par les autorités marocaines comme un terrain de chasse gardée. C’est une zone interdite aux étrangers quelle que soit la raison de leur visite. Les mass media n’en parlent pas. Les quelques cas exceptionnels qui ont pu visiter le territoire ont été défavorables aux thèses marocaines. Une raison de plus qui les a poussé á fermer cette zone définitivement.

    Nous avions eu beaucoup d’enthousiasme et d’espoir avec l‘arrivée de la Minurso mais nous avons été rapidement déçus car jusqu'à présent elle n’a pas eu le courage politique d’être un témoin et arbitre neutre. Elle n’a jamais abordé dans ses rapports les souffrances de nos populations dans les territoires occupés, surtout que les 13 années qu’elle a passées dans le territoire étaient marquées par la recrudescence de la lutte politique de notre population contre l’occupant marocain.

    L’espoir stérile

    L’enthousiasme qu’avait créé le cessez-le-feu s’était vite évaporé à cause du refus du Maroc et des obstacles qu’avait dressés la partie marocaine. Certes nous avions tous considèré que la présence de la Minurso sur le terrain est une victoire politique et militaire du Front Polisario car elle a permis l’ouverture du territoire au personnel des Nations Unies alors qu’il était strictement interdit aux étrangers.

    Le fait d’avoir changé le terrain de combat au siège des Nations Unies est une victoire décisive pour les Sahraouis. Nous étions sûrs que les Nations Unies ne vont pas intervenir militairement pour libérer le Sahara Occidental de l’occupation militaire. Nous voulions l’ouverture de ce territoire fermé et ce conflit de basse intensité, comme il était qualifié par les Américains durant la guerre froide, à d’autres acteurs internationaux, particulièrement les Nations Unies, qui venaient de renaître après la libération du Koweït sous son égide: l’internationalisation du conflit. Les Sahraouis ont été très habiles et ont su exploiter la naïveté des Nations Unies qui reprenaient leur souffle sur la scène internationale après la guerre froide.

    Notre foi et notre confiance dans cette organisation étaient divisées en deux. D’une part elle représente toutes les vertus de l’humanité et le droit international…etc. mais le personnel qui y travaille a toujours suscité une certaine méfiance vis-à-vis d’elle. Trahison de Pérez de Cuellar en dernière minute. Il fut remplacérpar Boutros Ghali ,que nous connaissions très bien quand il était ministre des Affaires étragères de son pays, l’Egypte. Une fois de plus nous avions lutté contre vents et marées, les circonstances régionales et internationales n’étaient pas en notre faveur jusqu’à l’arrivée de Kofi Annan, qui a nommé James Baker comme son Envoyé personnel au Sahara Occidental.

    M.James Baker et ses réussites

    Le plan initial de règlement considérait que seules les personnes se trouvant dans le recensement espagnol de la population locale de 1974 (74'000 personnes) et leurs descendants, ont le droit de participer au référendum. Mais les autorités marocaines avaient entravé le processus d’identification des participants potentiels en prétendant que des dizaines de milliers de Sahraouis avaient fui la colonisation espagnole et qu’elles résidaient dans tout le territoire marocain. Ce sont les tribus contestées. Le Front Polisario avait refusé leur identification car il considérait que ces populations n’ont pas de relations avec le territoire et n’ont pas le droit d’être identifiées.

    La nomination de Baker a créé beaucoup d’espoir, non pas parmi les réfugiés, mais surtout l’élite politique qui avait le dossier en main. Sa première réussite fut l’organisation d’une série de rencontres directes entre le Front Polisario et le Maroc sous ses auspices, chose que refusait le Maroc. Sa deuxième réussite fut la signature des accords de Houston fin 1997 ,qui stipulent les conditions d’identification de ces tribus contestées et par conséquence la reprise de l’identification des électeurs potentiels. C’était un défi très dangereux auquel le Front Polisario avait accepté de faire face. Cette phase d’identification a été énorme car elle s’est déroulée non seulement au Sahara Occidental mais aussi dans tout le Maroc, la Mauritanie et les campements des réfugiés. L’identification de ces tribus contestées a constitué une grande défaite pour le Maroc qui avait présenté une liste de 65'000 personnes dont seulement 3000 ont été acceptées par la Commission d’identification comme personnes habilitées à participer au référendum. Un échec fracassant pour le Maroc. La commission d’identification a établi la liste définitive des votants soit: 86'000 votants.

    Le Maroc a étudié toute l’opération d’identification et a constaté d’une part que la majorité de ces 86'000 personnes provient du territoire et qu’elle votera pour l’indépendance et que d’autre part la Commission d’identification a rejetté plus de 130'000 personnes qu’il a présentées. Un autre échec intérieur cette fois-ci devant son propre peuple. Il opta alors pour l’abandon pur et simple du plan de règlement des Nations Unies pour le référendum au Sahara Occidental.

    Depuis lors le Maroc a refusé d’accepter tout plan des Nations Unies pour résoudre le problème qui ne soit pas en sa faveur. Il ne veut pas prendre de risques comme le Front Polisario. En un mot le Maroc refuse de jouer le jeu démocratique du référendum: gagner ou perdre un plébiscite populaire. Le Maroc veut un référendum qui confirme sa souveraineté sur le territoire alors que les différentes résolutions de l’Assemblé générale des Nations Unies et du Conseil de Sécurité parlent du droit á l’autodétermination, donc du droit des populations de choisir entre l’intégration au Maroc ou l’indépendance. Le Maroc n’a pas pu enlever cette option des différents plans des Nations Unies et c’est pour cette raison qu’il refuse le Plan Baker II. Un autre échec plus coûteux à long terme que les premiers.

    Comment les Sahraouis voient les Nations Unies

    Nous, les Sahraouis, sommes obligés à suivre de près l’évolution de notre problème, pour cela nous suivons avec beaucoup d’importance toutes les radios du monde, toutes les chaînes de télévision, la moindre information a une très grande importance et nous la discutons tout le temps, n’importe où, en famille, en route, dans les bureaux et aux premières retrouvailles. Nous sommes devenus le peuple de " qu’est ce qu’il y a de nouveau? Avez vous écouté les informations d’hier, ce matin…?" Tout cela parce que chacun de nous s’attend à ce que quelque chose de rapide viendra le soulager dans son attente interminable, des Nations Unies peut être!!! Elles sont saisies du dossier depuis le début des années soixante!!

    Notre souffrance est double. D’une part on se sent trahis par nos voisins qui avaient tout fait pour anéantir l’existence même de notre peuple Ils nous avaient humiliés au vu et su du monde. D’autre part la communauté internationale n’était pas venue à notre secours. Quand elle est intervenue, elle n’était pas au niveau de nos attentes.

    Les Nations Unies qui n’ont pas pu accomplir leur mission dans notre pays nous ont déçus, frustrés et elles nous poussent par leur passivité, vers la capitulation et la soumission totale au Maroc. Le personnel civil qui a travaillé jusqu’á présent au Sahara Occidental est toujours favorable au Maroc surtout celui d’origine arabe ou asiatique.

    Notre population ne cherche pas à comprendre les causes de cette passivité ou ce qui préoccupe le monde, c’est a dire les enjeux géostratégiques des puissances internationales et les intérêts des pays engagés directement dans le conflit contre notre peuple c’est-á -dire le Maroc et derrière lui la France. Essayer d’évoquer avec un Sahraoui les thèses marocaines comme quoi le Sahara est marocain ou que vous êtes des mercenaires de l’Algérie. Nous n’avons pas besoin de chercher loin dans l’histoire ou dans les livres, mon père, ma mère, mes grands parents n’avaient jamais vu de Marocains au Sahara Occidental avant les années 60 sauf bien sûr ceux qui étaient venus dans le cadre de l’armée espagnole au Sahara ou plus tard ceux venus s’installer dans les principales villes á partir des années 60 à la recherche de conditions de vie meilleures. Qui est ce qui peut convaincre ces populations que le Sahara est marocain ou que lui même est marocain? Personne au monde sauf les Marocains eux mêmes!!!

    Nous avons toujours constaté avec beaucoup d’amertume que cette organisation n’est pas très efficace. Elle n’a rien fait contre le Maroc, et non plus, rien fait pour les Sahraouis. Pire elle force toujours la main des Sahraouis pour découvrir les concessions qu’ils pourraient donner à la partie marocaine via les Nations Unies. Quel médiateur ?

    On doit reconnaître que c’est grâce aux Nations Unies et à la Minurso que le cessez-le-feu perdure et c’est grâce à cette paix apparente qu’elles ont pu développer les différentes formules pour résoudre la question du Sahara Occidental jusqu’au dernier le plan de James Baker II.

    Mais tout ce qu’elles ont réalisé jusqu’à présent n’a pas radicalement amélioré l’état psychologique des Sahraouis des deux côtés du mur. Nous voulons vivre cette indépendance avant de mourir. Pour nous les Nations Unies doivent être en mesure de dire au gouvernement marocain "ça suffit, vous devez renoncer à vos tergiversations inutiles, la communauté internationale ne peut pas continuer à vous défendre indéfiniment alors que vous refusez d’accepter ses résolutions….etc.". Il y a une grande similitude entre notre espoir en Dieu et dans les Nations Unies. Si nous supplions Dieu cinq fois par jour avant et après chaque prière pour qu’il nous donne plus de patience pour supporter cette injustice ou du courage pour la combattre, notre croyance intime et collective est que cette communauté internationale peut faire quelque chose et ainsi sauver notre peuple de cette mort certaine.

    Trois décennies se sont écoulées. Chaque fois que l’on arrive au bout du tunnel, d’autres obstacles apparaissent et ainsi de suite. Notre espoir s’est plutôt transformé en frustration et découragement. Les longues années passées ont tout consommé: l’espoir, l’esprit de vengeance, la colère et même les rêves.

    Mais, malgré ce pessimisme accumulé, notre peuple croit toujours en Dieu d’autant plus qu’il est convaincu qu’il est victime d’une injustice que la communauté internationale n’a pas pu combattre adéquatement comme elle l'a fait dans d’autres régions du monde: Koweït, Bosnie et dernièrement l’Irak.

    Marocains et Sahraouis

    Le peuple marocain tout entier et particulièrement les jeunes générations ignorent ce qui s’était passé au Sahara Occidental. Eux aussi ont été victimes de la même répression politique, de la manipulation et de la propagande du régime marocain et des partis politiques.. Il se peut aussi que l’une des raisons de cette ignorance soit la grande distance qui sépare le Sahara Occidental de l’intérieur du Maroc.

    Après la construction des murs, le Sahara Occidental a constitué un foyer d’attraction, ou mieux dit, un Eldorado pour des milliers de chômeurs marocains: l’armée reçoit la double solde, l’exploitation du phosphate mais surtout pour travailler dans la pêche. Pour eux le Sahara rapporte de l’argent à des milliers de familles marocaines et c’est le plus important dans un pays où une grande partie du peuple souffre du chômage et de la pauvreté.

    Cette unanimité et ce consensus national sont artificiels et sont le résultat d’une complicité entre le régime, les élites et l’armée. Ils tirent tous des profits politiques et financiers énormes de cette surenchère nationaliste. Aucun d’eux n’est prêt à faire le premier pas vers la solution, craignant que les autres vont l’accuser de trahison.

    Pour ces considérations, nous, Sahraouis, pardonnons au peuple marocain et comprenons sa situation. Le jour où ce peuple jouira d’une vraie monarchie constitutionnelle, son unanimité et consensus iront vers la reconnaissance du peuple sahraoui et la rectification des erreurs du passé comme vient de le faire le peuple espagnol á travers ses deux chambres parlementaires.

    Le conflit du Sahara Occidental a été et continue d’être utilisé contre les peuples sahraoui et marocain. Ils ont tous les deux payé les caprices des rois marocains, des élites marocaines et de la guerre froide. Cette unanimité des Marocains autour de la question du Sahara Occidental me rappelle l’unanimité des Egyptiens ou des Arabes dans leur conflit avec Israël. Le feu président Sadate avait découvert que la paix avec Israël rapportera à son pays plus que toutes les aides des pays arabes ensemble. Il savait l’hypocrisie des arabes. Leur zèle nationaliste n’était qu’un mirage. Au moment où l’Irak a envahi le Koweït, le parlement Irakien a voté que ce pays est une partie de la souveraineté irakienne. Quelques mois plus tard, sous la pression de la force, le même parlement a voté que le Koweït n’est pas irakien!!! Où est donc cette unanimité ou ce consensus ? Quelle différence y a -t -il entre les rois du Maroc et Saddam? Les deux pays ont envahi des territoires qui ne leur appartenaient pas et les deux ont utilisé du napalm et des produits chimiques contre les Sahraouis et les Kurdes. L’Irak livrait du pétrole gratuitement au Maroc!!!

    Nous les Sahraouis avions hautement crié que le régime de Hassan II était un régime répressif, sans scrupule pour le respect des droits de l’homme. Ne parlons pas de la démocratie. Beaucoup d’experts dans le monde occidental nous disaient que Hassan II est un homme équilibré et ouvert. Le Maroc est l’unique pays arabe où il y a un pluralisme politique. Après sa mort, tout le monde commença à évoquer les années de plomb, de terreur et de la répression politique. Le Maroc est apparu sous une autre lumière.

    Alors l’histoire a plutôt démontré que les Sahraouis avaient raison? Peut-on avoir le courage moral de leur reconnaître cette vérité? Hassan II avait effectivement trompé et manipulé tout le monde, il a induit son peuple et ses amis en erreur. Hassan II a créé cette illusion d’une unanimité marocaine autour du Sahara Occidental. Il est mort comme les pharaons emportant avec lui les secrets de cette unanimité.

    Aujourd’hui les Sahraouis ont à faire face à trois éléments importants qui forment les inconnues de leur équation:

    Nous sommes aujourd’hui en mesure de juger l’histoire de ce conflit et ses acteurs. Le Maroc a toujours gagné tactiquement mais a toujours perdu stratégiquement. Le Front Polisario par contre a toujours souffert des obstacles créés par le Maroc mais finit toujours gagnant dans toutes les batailles qu’il a menées contre lui.

    Le Front Polisario a aussi réussi une autre victoire très importante au niveau de l’Espagne. Ce pays qui a donné en 1975 au Maroc ce qu’il considérait jusqu’à alors comme étant le Sahara espagnol et a causé les souffrances du peuple sahraoui, a été obligé par ses propres forces politiques et son opinion publique, à prendre une position plus ferme sur ce conflit, à savoir libérer la conscience des Espagnols en tant que peuple et Etat du complexe de culpabilité envers le peuple sahraoui. La dernière motion votée à l’unanimité par les deux chambres espagnoles le 15 Septembre 2004 est un bon début.

    Après les attentats du 11S, le Maroc a essayé, utilisant toutes sortes de moyens de lier le Front Polisario au terrorisme international et aux groupes intégristes islamiques . Or le Front Polisario est le seul mouvement de libération qui n’a pas recouru au terrorisme durant les 17 années de guerre contre l’armée marocaine. Il n’a pas non plus eu des relations avec tous les groupes terroristes des années 70 et 80. Il est aussi le seul mouvement de libération qui n’avait pas reçu d’aide que se soit directement ou indirectement de l’Union Soviétiques et de son bloc. Un bon record dans son histoire. Espérons qu’il soit bien compris.

    Le Maroc ne compte aujourd’hui que sur l’appui aveugle et inconditionnel de la France. Deviendra t-il l'Israël du Maghreb?

    Perspectives

    Les perspectives de solution du conflit sont sombres. C’est la stagnation totale. Chacune des deux parties préfère mourir debout que de se rendre.

    Les Marocains, pour complexer le monde, prétendent dans leur propagande que la question du Sahara Occidental est sacrée pour eux. Elle n’est pas le problème d’un gouvernement, d’un parti politique ou même du roi mais celui de la nation marocaine toute entière. Ils sont tous prêts à se sacrifier pour la défense de l’intégrité territoriale du royaume.

    Nous Sahraouis disons que le Maroc n’a jamais eu de souveraineté sur le Sahara Occidental et nous n’avons pas besoin de convaincre nos populations d’une telle position.

    Le conflit va continuer jusqu’au jour où les Marocains se rendront compte que ce problème leur a été imposé par leurs rois, gouvernements, élites militaires et politiques et surtout leur égoïsme et chauvinisme. Il semble que le peuple marocain sent et croit que son gouvernement est en position de force. Cependant deux réalités lui échappent: que la guerre absorbe une grande partie du budget national et qu’elle a été principalement financée par des subventions des pays arabes du Golfe. Peut-être même une caisse noire!!! Ici une question se pose, est ce que la falsification de l’équivalent de 350 millions d'Euros révélée après l’assassinat de Mandari n’a pas quelque chose à faire avec l’effort de guerre? Celui qui ose falsifier cette somme peut le faire avec des quantités plus grandes et avec des monnaies de différents pays. Une chose est sûre, ce n’est pas avec les agrumes et les rentrées de l’émigration à l’étranger que le Maroc peut maintenir le financement d’un effort de guerre engageant plus de 120'000 soldats durant 29 ans!!!

    Conclusion

    Nous Sahraouis, sommes agressés, opprimés et malheureusement nous n’avons pas les moyens de nous venger contre notre ennemi. Le plus difficile est qu’on nous prive de notre droit de légitime défense sous prétexte que tout problème peut avoir une solution politique et pacifique. Notre patience individuelle et collective s’est évaporée sous les rayons du soleil brûlant du désert pendant ces trente années écoulées.

    Devons nous crier à haute voix ou simplement pleurer intimement et sans larmes? Comment dans ce silence qui nous entoure, pourrions-nous faire entendre notre voix au monde?

    Une chose est certaine, tous les Sahraouis vous disent aujourd’hui que la partie la plus difficile de notre combat est passée et que nous avons présenté beaucoup de martyrs, que ce soit durant les batailles militaires contre l’armée marocaine ou des martyrs politiques dans les territoires occupés de notre pays. Nous avons perdu tout ce que nous pouvions perdre et nous avons tout à gagner, l’indépendance de notre pays. Le Maroc quant à lui a trop perdu et perdera plus tant qu’il court derrière le mirage du désert ou continue à faire miroiter devant son peuple l’or du Rio de Oro qui n’a jamais existé!!!

    Hamdi Salek Allal
    Auserd, campements de réfugiés, le 27 Septembre 2004


    [HOME] - [L'autodétermination du Sahara Occidental, 1974 - 2004] - [Communiqués, lettres, Documents...]