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Solidaridad Urgente
27 feb 99


DEUX SAHRAOUIS ARRÊTÉS AUX CANARIES SONT REMIS PAR LES AUTORITÉS ESPAGNOLES AUX AUTORITÉS MAROCAINES


Nous, les organisations signataires, nous avons appris par un communiqué de l'Association Canarienne de Solidarité avec le Peuple Sahraoui, daté du 13 fevrier 1999, la remise par les autorités espagnoles aux autorités marocaines des citoyens saharaouis MOHAMED CHIGALI et ABDALLAH RUH, survenue entre le 7 et le 8 fevrier 1999. D'autres versions soutiennent que ces citoyens auraient été remis entre le 7 et le 8 février 1999. Tous les deux fils de sahraouis de nationalité espagnole au moment du retrait de l'Espagne du territoire du Sahara Occidental.

Faits:

Mohamed Chigali, né à Argub (Sahara Occidental) en 1967, de père sergent (RETRAITÉ) de l'armée espagnole. Il vivait dans les camps de refugiés sahraouis entre 1976, peu après l'invasion marocaine, et 1996, année où il est parti en Mauritanie. Il est arrivé aux Iles Canaries le 21 mai 1998 avec passeport mauritanien et carte d'identité sahraoui.

Abdallah Ruh vivait à Dajla, territoires occupés jusqu'en 1989. Compte tenu de la répression du pays occupant, le Maroc, il s'est vu obligé à fuir vers les camps de réfugiés, où il a résidé jusqu'en 1996. Après, il s'est rendu en Mauritanie. Il serait arrivé aux Canaries en 1998 avec passeport mauritanien et carte d'identité sahraoui.

Les deux citoyens sahraouis ont résidé pendant un certain temps à la Gomera et ont été arrêtés à Santa Cruz de Tenerife dans les premiers jours de février. Il ont été livrés aux autorités marocaines le 4 février, selon l'Association Canarienne de Solidarité avec le peuple sahraoui. D'autres versions recueillies soutiennent que ces citoyens auraient été remis aux autorités marocaines entre le 7 et le 8 février 1999 à la frontière avec Melilla. Il ne s'agit pas d'un fait isolé, mais d´un type d'action qui s'est déjà produite avant. Au moment de son retrait en 1976, l'Espagne a donné au Maroc les fiches de police en son pouvoir. En 1984, le Gouvernement espagnol a remis aux autorités marocaines le citoyen sahraoui Masaud Mohamed Fadel Laarusi, qui se trouvait en Espagne pour poursuivre une formation comme pilote. Les autorités marocaines l'ont enfermé pendant plusieurs mois à la prison de Kenitra, où il a été soumis à toute sorte de tortures et mauvais traitements. En 1995, un autre Sahraoui, Hamad Ali Hamad, après s'être réfugié à l'Ambassade espagnole à Rabat, a été livré aux autorités marocaines sous "garanties", celles-ci n´ayant jamais été respectées, puisqu´il a été par la suite arrêté et torturé. C´est aussi en 1998 que le citoyen sahraoui Yamal Dah Mohamed a été transféré de Las Palmas de Gran Canaria à Melilla où il a été remis à la police marocaine à la frontière, bien qu'il fût en possession de papiers l'accréditant comme Sahraoui.

Fondements de droit:

Etant donné la situation de belligérance reconnue existant entre le Royaume du Maroc et la République Arabe Sahraoui Démocratique, représentée par le Front Polisario, nous nous trouvons face à une flagrante violation des lois internationales humanitaires, concrètement celles concernant les dispositions des conventions de Genève qui interdisent la prise d'otages au sein de la population civile (art. 3.1.b) de la Convention IV) et, par conséquent, la remise de personnes à la partie adversaire en conflit, puissance occupante dans ce cas. La remise de ces citoyens sahraouis de parents espagnols que les autorités espagnoles ont effectuée aux autorités marocaines, aurait été analogue, à l'époque de la 2ème Guerre Mondiale, au fait de livrer un citoyen britannique aux autorités allemandes par un tierce pays non belligérant. Cette action constitue aussi une violation claire de la Convention des Nations Unies de 1951 relative au statut des réfugiés, entrée en vigeur en Espagne le 12 novembre 1978. Conformément à l'art. 1.A.2) de celle-ci, le terme "réfugié" s'appliquera - en relation avec l'art. I.2 du "Protocole relatif au statut des réfugiés", approuvé par l'Assemblée générale de l'ONU le 16 décembre 1966 (BOE nº 252 du 21Octobre 1978)- à toute personne qui, "craignant avec raison d'être persécutée du fait de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques, se trouve hors du pays dont elle a la nationalité et qui ne peut ou, du fait de cette crainte, ne veut se réclamer de la protection de ce pays; ou qui, si elle n'a pas de nationalité et se trouve hors du pays dans lequel elle avait sa résidence habituelle à la suite de tels événements, ne peut ou, en raison de ladite crainte, ne veut y retourner".

L'art. 33.1 de cette Convention dispose: "Aucun des Etats contractants n'expulsera ou ne refoulera, de quelque manière que ce soit, un réfugié sur les frontières des territoires où sa vie ou sa liberté serait menacée en raison de sa race, de sa religion, de sa nationalité, de son appartenance à un certain groupe social ou de ses opinions politiques." Conformément à l'exposé ci-dessus, et vu qu'il existe des éléments objectifs concluants sur le risque que suppose pour un citoyen sahraoui d´être appréhendé par les autorités marocaines, en aucun cas ces citoyens ne pourront être refoulés ou remis au Maroc. Il est donc impératif d'appliquer le principe du droit international appelé "non refoulement".

D'autre part, il convient de rappeler que le Royaume du Maroc a décidé finalement d'officialiser la situation du Haut Commissaire des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) sur le Territoire. De son côté, la législation espagnole, dans l'art. 107.3 du Décret Royal 155/96 du 2 février, en vertu duquel est approuvé le Règlement d'exécution de la Loi Organique des Droits et Libertés des Etrangers, établit: "Quand on ne pourra pas procéder à l'exécution d'expulsion étant donné l´impossibilité de renvoyer l'étranger à son pays d'origine ou dans aucun autre [qui, dans ce cas, et en vertu de l'art. 33 de la dite Convention, ne pourra jamais être le Maroc], on pourra autoriser son séjour ou sa résidence sur le territoire espagnol, conformément aux articles 46 et 50 de ce Règlement".

Actions sollicitées:

A) Au Gouvernement espagnol:

1) Mener une enquête exhaustive des faits afin d´éclaircir les possibles responsabilités et exclure du corps de police les responsables des ordres ayant donné lieu à la remise au Maroc de ces citoyens sahraouis possédant un passeport mauritanien et originaire d'un pays belligérant reconnu comme tel par le Maroc et par les Nations Unies.

2) Mettre en marche les voies diplomatiques nécessaires à la garantie du respect des droits individuels des ces citoyens sahraouis, en veillant à tout moment à leur intégrité physique et psychologique, en tenant compte du respect de la Convention contre la Torture et Autres Peines ou Traitements Cruels, Inhumains ou Dégradants, qui est une pratique systématique des corps et des forces de sécurité marocains.

3) Donner les instructions aux autorités consulaires espagnoles pour qu'elles procèdent par les voies diplomatiques nécessaires à vérifier l'état physique de MOHAMED CHIGALI y ABDALLAH RUH et leur apporter l'aide indispensable pour leur garantir ce dont ils auraient besoin (assistance juridique, médicale ou économique)

4) Procéder aux reconnaissance du dommage produit par le Gouvernement espagnol et adopter les mesures juridiques et diplomatiques nécessaires à sa réparation, et, en coordination avec le HCR et les autorités du Front Polisario, assurer leur sortie du Maroc.

B) Aux autorités du Royaume du Maroc:

1) Garantir à tout moment l'intégrité physique et psychologique de MOHAMED CHIGALI et ABDALLAH RUH, en respectant en toute circonstance les dispositions établies par la Convention contre la Torture, ratifiée par le Royaume du Maroc et, en tout cas, en respectant le traitement minimum dont devrait jouir la population civile retenue par un belligérant, selon les dispositions appliquées et recueillies dans l'art. 3 commun aux Conventions de Genève.

2) Procéder à la sortie du Maroc et au rapatriement immédiat, en parfaites conditions de santé, des deux citoyens sahraouis, coordonné par le HCR et les autorités du Front Polisario, et toujours dans le contexte de l'égalité des conditions que les conventions de Genève concèdent aux parties belligérantes.

3) Rappeler que conformément à la Convention contre la Torture, tous les fonctionnaires responsables de l´implantation de telles pratiques devront y répondre par voie judiciaire.


ENVOYER FAX ET CARTES POSTALES A:

A) Liste des autorités espagnoles:

1) Presidencia del Gobierno - Jose Maria Aznar Lopez Complejo de la Moncloa - 28071 Madrid
Director del Gabinete de la Presidencia - Carlos Aragones Mendiguchia
Complejo de la Moncloa - Madrid Fax: +34.1.390.0356

2) Ministro del Interior - Jaime Mayor Oreja Paseo de la Castellana, 5 - 28071 Madrid
Fax: +34.91.522.1538 +34.91.522.5865

3) Defensor del Pueblo - Fernando Alvarez de Miranda y Torres Eduardo.
Eduardo Dato, 31 - 28071 Madrid Fax: +34.91.308.1158

4) Consejo General del Poder Judicial - Presidente Francisco Javier Delgado
Barrio Marques de la Ensenada, 8 - 28071 Madrid Fax: +34.91.310.0306

5) Fiscal General del Estado - Jesús Cardenal Fortuny, 4 - 28071 Madrid,
Fax: +34.91.319.3317

6) Ministro de Asuntos Exteriores - Juan Abel Matutes Plaza de la Provincia, 1 - 28071 Madrid
Fax +34.91.366.3856

B) Liste des autorités marocaines:

1) DEPARTEMENT DU PREMIER MINISTRE Palais Royal Le Me'chouar - Rabat
Premier Ministre et Ministre des Affaires Etrangères et de laCoopération : M. Abdellatif FILALI
Tel : +212.7.76 17 63 Fax : +212.7.76 99 95

2) Ministre d'Etat : Moulay Ahmed ALAOUI Présidence du Conseil - Palais Royal
Tel. : +212.7.76 35 78 y +212.7.76 35 95 Fax : +212.7.76 27 32

3) MINISTERE D'ETAT A L'INTERIEUR Quartier Administratif - Rabat
Tel : +212.7.76.18.61 Fax : +212.7.76 20 56

4) MINISTERE DE LA JUSTICE Place Mamounia - Rabat
Tel.: +212.07.73 29 41 , Fax: +212.7. 73 07 72

5) ADMINISTRATION PENITENTIAIRE
Directeur : M. Mohamed LIDIDI
Tel.: +212.7.70.57.22

6) Aux ambassades marocaines dans leurs pays respectifs


ORGANISMES DE DROITS DE L´HOMME SOUSCRIVANT CETTE ACTION:

AFAPREDESA (Association des Familles de Disparus et Détenus Sahraouis);
Asociación Pro Derechos Humanos de Andalucia;
Asociación pro Derechos Humanos de Espanha;
Equipo Nizkor;
Federación de Asociaciones de Defensa y Promoción de los Derechos Humanos;
Serpaj Europa;


INFORMATION COMPLÉMENTAIRE DANS:

- Sentence dictée par la Cour suprême, où l´on reconnaît la nationalité espagnole d´un Sahraoui né à l´Aaiún quand le Sahara occidental était une province espagnole, dont peuvent jouir 73.497 sahraouis. Sentence de la Chambre civile de la Cour suprême nº 1.026/1998 du 28 octobre 98. [ESP/SPA] http://www.derechos.org/nizkor/espana/doc/sahasente.html

- Human Rights in Morocco & Western Sahara (Human Rights Reports, Actions, links, etc)

- "Western Sahara: the Referendum that wasn't and the one that still might be". By Frank Ruddy. Former United States Ambassador. President of the International Association of Jurists for Western Sahara.

- Situación de los Derechos Humanos en el Sáhara Occidental. Human Rights Report. Informe Oct98 AFAPREDESA / AFAPREDESA report Oct98. [ESP/SPA]

- Listado de desaparecidos saharauis desde 1975. List of saharawi disappeared since 1975. [ESP/SPA]


Solidarité Urgente est publié par Equipo Nizkor membre du Serpaj Europa, Derechos Human Rights (USA) et GILC (Global Internet Liberty Campaign). adresse Desenganho, 12 - 5 Piso - 28004 - Madrid - Espana. Tél: +34.91.526.7502 et Fax: +34.91.526.7515 http://www.derechos.org/nizkor - En espagnol: Mailto: nizkor@derechos.org - Nizkor International Human Rights Team - en Anglais et Français.l

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