LE MATIN, Alger, 17.9.1995

"La guerre du transistor"

Ratiba A.

Le monde dans lequel nous vivons aujourd'hui est un univers médiatisé, où l'information est un autre pouvoir. Le phénomène de "mondialisation de l'information" a également prouvé que des guerres pouvaient être gagnées "avant même de les entreprendre".

L'"opération chirurgicale" tentée sur l'Irak et le peuple irakien est encore fraîche dans nos esprits, elle reste la belle illustration de la mobilisation, par les coalisés, des médias lourds, à leur tête la chaîne CNN.

Pour M. Sidati, ex-ministre sahraoui de l'information, "la guerre médiatique est aussi sanglante que la guerre proprement dite". Ce responsable rappelle, à juste titre, que dans toutes les guerres de libération, les pertes humaines et matérielles sont plus importantes lorsque l'information fait défautou lorsqu'il n'y a pas d'"amplification".

Concernant la lutte du peuple sahraoui, M. Sidati explique que ce dernier est passé par un certain nombre d'étapes, d'abord celle de "la voix des armes", où le combat armé était la réaction naturelle à l'occupation maroco-mauritanienne puis à l'occupation marocaine.

Par la suite, les armes se sont tuesde temps à autre pour laisser place à la "guerre des informations", et c'était "faire la preuve d'une adaptation et d'un savoir-faire".

La période de "ni guerre ni paix" qui s'annonçait prometteuse au départ parce qu'engageant la responsabilité de l'Organisation des Nations unies,présente dans le territoire du Sahara occidental, n'a fait que perdurer. Sur le plan médiatique, "on a cherché à banaliser la cause sahraouie".

Il faut peut-être relever que l'aspect "indépendantiste" du Front POLISARIO n'a sûrement pas été du goût de certains Etats. En outre, le fait que les Sahraouis "n'ont pas versé dans le spectaculaire, par décence et éthique", évitant la mort à plusieurs milliers de civils marocains, n'a pas eu les échos attendus, notamment auprès de la communauté internationale.

Les responsables sahraouis sont conscients du rôle important de l'information, pour communiquer le message du peuple sahraoui en lutte et "additionner les sympathies des autres pays".

Sur le plan interne la RASD dispose d'une presse et d'une Radio nationales. Le Front POLISARIO s'est organisé, là où il y a des communautés sahraouies, pour maintenir le contact avec elles. Et surtout maintenir la cohésion.

En 1976, le roi du Maroc avait parlé de "la guerre du transistor", faisant allusion au rôle grandissant de la radio sahraouie.

De gros moyens avaient été déployés à l'époque pour que l'information ne passe pas, mais en vain. La guerre du transistor se poursuit encore à ce jour.

La guerre au Sahara occidental a de nombreuses complicités et elle est entourée de trop de silence, mais "on est parvenu à rompre le blocus autour de la question sahraouie", affirme l'ex-ministre sahraoui de l'information, en faisant remarquer que le Maroc réprime avec férocité les autochtones dans les territoires occupés parce qu'"il y a prise de conscience de l'existence d'une résistance sahraouie".

Puis de conclure: "L'essentiel des efforts doit venir des Sahraouis eux-mêmes. Il faut, à présent, tabler sur la résistance dans les territoires occupés".


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